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v. brochard. — de la loi de similarité

licité par sa nature ; il utilise sa puissance de dissocier les idées et de les recomposer, comme l’oiseau se sert de ses ailes ou le poisson de ses nageoires. La vraie différence, semble-t-il, réside dans l’aperception de la ressemblance et dans le raisonnement qui en résulte. Rien en effet n’autorise à supposer que l’animal, même au moment où il prévoit un événement semblable à ceux qu’il a déjà connus, se rende compte de la ressemblance : dominé par son idée, il accomplit les actes qui sont liés à cette idée et qu’elle suggère, suivant les lois qui unissent les faits de conscience et les mouvements. L’homme fait d’abord la même chose ; mais, en outre, il se rend compte de ce qu’il fait. Après la spontanéité et l’élan, ou presque en même temps, la réflexion apparaît : il comprend. On voit bien la différence à la diversité des sentiments que l’homme et l’animal manifestent à la suite des mêmes actions. Vraisemblablement, les chiens arctiques dont on nous parle, après l’acte qui les sauve, sont ce qu’ils étaient auparavant : une fois l’événement passé, si vivement qu’il les ait frappés, ils n’y pensent plus : il se perd avec les autres dans le passé, jusqu’à la prochaine occasion. L’homme aime à se rendre compte de ce qu’il a fait : il se complaît à refaire son raisonnement, et par cela même il se rehausse à ses propres yeux ; il éprouve ce contentement de soi-même, cette fierté que tout homme a connue à l’instant où s’éclairait pour lui quelque vérité difficile, cette joie de l’intelligence qui se sent elle-même, si manifeste chez les enfants quand ils entrent en possession d’une idée nouvelle.

Nous n’avons envisagé jusqu’ici la loi de similarité que dans les associations d’idées complexes : doit-elle aussi disparaître si l’on considère les associations d’idées simples ? — Stuart Mill, discutant l’opinion que nous soutenons ici et qui avait déjà été défendue par Hamilton[1], demande si, au moment où une sensation sucrée éveille par association l’idée d’une sensation analogue antérieure[2], on peut voir dans cette association autre chose qu’un rapport de ressemblance. Il serait facile de multiplier les exemples de ce genre.

Il y a lieu de rechercher pourtant si, en pareil cas, il y a bien

  1. « In gênerai, Similarity has been lightly assumed, lightly laid down, as one of the ultimate principles of associations. Nothing, howewer, can be clearer than that resembling objects, resembling mental modifications, being, to us, in their resembling points, identical ; they must, on the principle of Répétition, call up each other. This, of course, refers principally to suggestion for the first time. Subsequently, Redintegration co-operates with Répétition ; for now, the resembling objects have formed, together, parts of the same mental whole ; and are, moreover, associated both as similar and as contrasted. » The wurks of Thomas Reid, now fully collected by S. W. Hamilton, p. 913 (Edinburgh, Maclachlan and Stewart, 1873, sixth. edit.)
  2. Philosophie de Hamilton, ch. XIV, p. 302, trad. Cazelles.