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ÉTUDES

DE PSYCHOLOGIE COMPARÉE



LE SENS DE LÀ COULEUR :

SON ORIGINE ET SON DÉVELOPPEMENT[1]


I

La construction que nous venons de décrire n’a point été élevée de toutes pièces par M. Allen ; elle a son fondement dans les travaux antérieurs de l’école zoologique anglaise. Il serait difficile de dire à qui revient l’honneur d’avoir posé la première assise. Darwin semble avoir conçu l’idée dont la théorie complète de M. Allen n’est que le développement. Nous lisons dans l’Origine des espèces : « Voici encore un autre exemple plus complexe, de nature à faire comprendre l’action de la sélection naturelle. Quelques plantes sécrètent des jus sucrés qui paraissent destinés à éliminer des substances probablement nuisibles à leur sève ; c’est ce que font par exemple des glandes placées à la base des stipules de quelques légumineuses et sur la partie dorsale des feuilles du laurier commun. Ces jus, quoique peu abondants, sont très recherchés par les insectes… Supposons que ce jus ou nectar soit sécrété, dans un certain nombre de plantes d’une espèce quelconque, par la partie intérieure delà fleur ; les insectes, en y pénétrant pour chercher le nectar, s’y couvriront de pollen, que dans leurs visites successives ils transporteront d’une fleura l’autre. Les fleurs des différents individus d’une même espèce peuvent ainsi arriver à se croiser, circonstance qui, ainsi que nous avons toute raison de le croire, donne des produits plus vigoureux et ayant par conséquent plus de chances de survivre et de prospérer. Les plantes dont les fleurs auraient les glandes ou nectaires les plus développés et produisant le plus de nectar, étant le plus fréquem-

  1. Voir le n° précédent.