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analyses.arpenter. Mesmerism, spiritualism, etc..

sens aient été choses beaucoup plus communes qu’au dix-neuvième siècle, la précaution était bien superflue. Il eût pu, sans nul doute, à Rome comme à Athènes, trouver des gens de toute condition, disposés à accepter et à publier, non sans les grossir, ses prétendus miracles. Marc-Aurèle lui-même ne crut-il pas en cet imposteur, au point d’entreprendre une expédition militaire sur la foi de ses prophéties ? Sans parler de Tite-Live, de Plutarque, de Virgile, et de tant d’autres écrivains de l’antiquité, le grave Tacite ne raconte-t-il pas un miracle de Vespasien, ajoutant même que ceux dont il tenait le miracle n’avaient aucun intérêt à dire un mensonge : Utrumque, qui interfuere, nunc quoque memorant, post quam nullum mendacio pretium. Et dans les temps modernes, n’a-t-on pas vu des hommes tels que lord Bacon et Addison, pour ne citer que les plus connus, traiter d’athées ceux qui refusaient de croire à la magie et à la sorcellerie ? De nos jours même, ne voit-on pas des savants d’une originalité scientifique incontestable, l’ingénieux inventeur du radiomètre, M. Grookes, et le co-partageant de la gloire de G. Darwin, M. Alfred R. Wallace, accepter sans réserve les prétendus phénomènes du spiritisme ? Cette question, qui parait si puérile et si ridicule à ceux que l’épidémie n’a pas atteints, n’a-t-elle pas été gravement discutée par l’Association britannique au congrès de Glasgow ? Il nous semble donc que M. W. B. Carpenter rend service au public en republiant ces conférences, faites d’abord à l’Institution de Londres et qui ont paru ensuite dans Fraser’s Magazine.

La première forme de ces illusions épidémiques que M. Carpenter examine est le mesmérisme. Il rappelle les conclusions de la commission scientifique nommée par le gouvernement français pour examiner la question. Dans la prétendue distribution du fluide magnétique, tiré du baquet ou tube magnétique, le rôle de l’imagination ou de l’attente (expectancy) est bien marqué. Il suffisait, par exemple, que le malade se trouvât près d’un arbre qu’il croyait magnétisé, pour qu’il éprouvât les convulsions ordinaires, et inversement il n’éprouvait rien, s’il se croyait près d’un arbre qui n’avait pas subi la prétendue magnétisation. M. Carpenter ne nie nullement la possibilité de produire artificiellement un sommeil mesmérique, correspondant à ce que l’on appelle en médecine le coma hystérique. Il reconnaît également que le somnambule hypnotisé qu’il désigne par l’expression automate conscient, peut penser, sentir, parler et agir suivant les suggestions qu’il reçoit, et que chaque faculté, étant concentrée sur l’état spécial d’activité du moment, peut acquérir une intensité extraordinaire. Mais là se bornent ses concessions. Il ne croit ni à la lucidité, ni au pouvoir d’un magnétiseur, de produire cet état chez leurs sujets, par un simple effort de la volonté, et à l’insu de ces derniers. Il fait justice, preuves en main, de plusieurs anecdotes sur lesquelles les croyants s’appuient généralement.

Passant à l’odylisme, il n’a pas de peine à montrer que la prétendue