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l’absence de tout obstacle (ce qui est dans l’hypothèse), est aussi le plus facile. Donc le mobile, s’il ne suit pas , fait une dépense de force inutile et dont il n’y a ni cause ni raison suffisante.

Dans quelques mots sur l’atome, M. Liebmann établit une théorie qu’il appelle dynamiste. Il admet cette pensée de Kant : il n’y a de science véritable que celle qui a su prendre la forme mathématique ; tout doit s’expliquer mécaniquement. Donc les éléments dont se compose la matière doivent être des unités mécaniques, c’est-à-dire, 1° être des forces ; 2° être des points mathématiques, puisque toute force est simple ; 3° agir à distance, et par [conséquent être environnés d’une sphère sur laquelle ils agissent. Les atomes seront donc des centres d’action. Et ils le sont en effet. Car puisqu’il y a des composés, il y a des simples, et ce qui est simple, aux yeux du mécanicien, c’est le point ; d’ailleurs l’atome étendu est inconcevable : s’il paraît atome, c’est par sa petitesse ; or, toute petitesse est relative : pour les dieux d’Épicure, un monde comme le nôtre est un atome. D’autre part, l’action à distance n’a rien de choquant : elle existe partout dans la nature car il faut bien admettre du vide.

Qu’entend M. Liebmann par ces mots : sphère d’action ? Cette sphère est-elle réelle ? Alors, comme elle est essentielle à l’atome, celui-ci est étendu. Est-elle fictive ? Il y faut voir alors une figure destinée à nous rendre accessible cette chose inimaginable en soi : l’action à distance. Mais cette action elle-même est une hypothèse superflue : dans les calculs de la mécanique, en effet, , une force n’est que le produit d’une masse par une vitesse. Un point qui est une force sera donc une masse ponctuelle, un point massif, et de plus mobile : il pourra donc se transporter en toutes les parties de sa sphère d’action, et agir directement. Maintenant toute la question est si l’identification d’une force avec un point, ou mieux d’une masse et d’un point, est permise. C’est à vrai dire un artifice fréquent en mécanique, de réduire une masse à un point choisi convenablement, mais c’est simplement comme si l’on réduisait plusieurs forces à leur résultante ; on entend par là que les diverses parties du corps agissent simultanément, et comme d’un seul effort ; mais cela ne prouve pas qu’une force soit un point. Le mécanicien sait que la masse d’un corps est indépendante de son volume, mais si l’unité de masse est absolument sans volume, c’est ce qu’il ignore.

Les Aphorismes de Cosmogonie sont assurément le chapitre le plus attrayant et le plus étonnant de tout le livre. Il contient : Une note sur l’introduction de l’esprit et des données de la science dans les questions de l’origine et de la fin de l’univers (Mythologie et Philosophie) ; — une Notice historique sur la découverte de la théorie de la nébuleuse : M. Liebmann, avec sagacité, la fait remonter de Laplace et Kant, à Buffon, et jusqu’à Newton ; — une discussion sur la probabilité de cette théorie, diminuée maintenant par la découverte de ce satellite d’Uranus, qui exécute sa révolution en sens inverse de tous les autres corps du système ; — une Géogonie ; la terre, dit M. Liebmann, s’est