-inférieurs à lui, donnent lieu à bien des doutes et à de grandes difficultés d’interprétation. Une bonne observation clinique, faite sur l’homme lui-même, enregistrée d’après ses déclarations, aurait plus de poids que toutes les vivisections. Or, que sentirait un homme privé de ses hémisphères cérébraux, le reste de l’encéphale étant intact ? Nous n’en savons rien ; mais on sait que dans les cas d’hémorragie cérébrale ou de ramollissement siégeant à la partie postérieure de la couronne rayonnante de Reil, de manière à interrompre les faisceaux nerveux qui relient la substance corticale avec le ganglion situé au-dessous et par conséquent avec les centres sensoriels, on observe, du côté opposé du corps, une anesthésie affectant les divers modes de la sensibilité, c’est-à-dire la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût, le toucher. — Le rôle psychologique des centres sensoriels est donc loin d’être nettement déterminé et nous souhaitons que M. Taine qui tient compte de tous les faits que chaque jour la physiologie nous apporte, examine à nouveau cette question. En général, on regarde les hémisphères cérébraux comme le siège des facultés intellectuelles les plus élevées. La thèse propre à M. Taine, c’est d’en faire « un instrument de répétition. » On peut considérer les centres sensoriels comme le lieu où sont représentés toutes les parties de notre corps et tout ce qui entre par nos sens spéciaux. Lorsqu’une sensation s’est produite, « une action exactement semblable se développe par contre-coup dans un élément cortical des lobes cérébraux et y éveille la sensation secondaire ou image… Plus l’écorce cérébrale est étendue, plus elle a d éléments capables de se mettre en action les uns les autres… plus elle est un instrument délicat de répétition. Le cerveau est donc le répétiteur des centres sensitifs ; tel est son emploi, et il l’exécute d’autant mieux qu’il est lui-même composé de répétiteurs plus nombreux » (tome I, p. 330). M. Taine admet que le cerveau étant composé d’éléments similaires mutuellement excitables, l’action transmise à l’un des éléments se transmet aux autres, à peu près comme une vibration qui passerait d’une corde à une autre ; c’est ce qui rend possibles ces associations, fusions, combinaisons d’images qui constituent toutes nos connaissances. — Cette hypothèse qu’il a très-ingénieusement exposée, a l’avantage d’être d’accord avec ce fait anatomique constant que les lobes cérébraux ont un très-grand développement chez les animaux les plus intelligents. Mais il n’est guère possible de se prononcer définitivement sur ce point, si l’on remarque que des travaux récents tendent à localiser certaines fonctions dans certaines parties de l’écorce cérébrale, et que de là on pourra peut-être un jour tirer des conséquences psychologiques inattendues.
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ribot. — m. taine et sa psychologie