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points a’, b’, c’ de celle de l’œil gauche. Supposons que le point A envoie ses deux images a et a’ sur la tache jaune, et disons que, dans ce cas, les points b et b’, c et c’sont conjugués. Figurons-nous maintenant que le point A se déplace le long du rayon qu’il envoie à l’œil droit, l’image a b c ne changera pas ; mais il n’en sera pas de même de l’image a’b’c’ : le point a’ va se déplacer sur la rétine. Mais si nous imposons à l’œil gauche, comme pour l’œil droit, la condition de fixer toujours le point A, ce seront, au contraire, les points a’ et c’ qui varieront. Or, pour chaque position donnée du point A le long du rayon, il y a une position donnée et unique des images b’ et c’ sur la rétine gauche.

De sorte que l’on peut dire d’une manière tout à fait générale que, pour une direction déterminée des deux axes optiques, il y a un couple déterminé de points rétiniens impressionnés par chaque point de l’espace. De là cette conséquence : du moment que nous fixons, par exemple, l’un des sommets d’une figure polyédrique, nous connaissons la place de chacun des autres sommets par cette circonstance que, dans cette position donnée des yeux, les deux rétines ont leurs points conjugués disposés d’une façon spéciale correspondant à cette position. Nos yeux complexes sont donc des appareils qui nous font connaître une figure de l’étendue au moyen de deux images différentes de cette figure : les éléments de cette connaissance sont, d’un côté, la direction des deux axes optiques, de l’autre, la variation des points conjugués. C’est ce qui fait que le voyageur surpris pendant la nuit par l’orage, peut reconnaître son chemin à la lueur instantanée des éclairs.

Or, certes, deux muqueuses nasales pourraient être formées d’après des principes identiques, et, dans ce cas, les sensations de l’odorat seraient, elles aussi, pour ainsi dire, inséparables de la perception de l’étendue.

V

Jusqu’à présent, je n’ai parlé principalement que de lumière et d’odeur, en tant qu’opposées à l’absence de lumière et d’odeur. Je puis maintenant généraliser et faire entrer en ligne de compte cette propriété des narines et des yeux de nous faire distinguer les différentes espèces de parfums et les différentes espèces de lumière, à savoir, les couleurs.

Si je suis au milieu d’un parterre de fleurs où à côté des résédas brillent les roses et les giroflées, ma vue m’apprend où sont ces