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boutroux.zeller et l'histoire de la philosophie

en matière d’érudition que M. Charles Thurot, parlant de l’ample provision de notes où M. Zeller cite et commente les textes, n’hésite pas à dire[1] que cette partie est aussi complète qu’on peut le désirer, que la critique de l’auteur est excellente, et que sa méthode ne peut qu’être approuvée et recommandée. Nous pensons répondre au désir des érudits philosophes en exposant ici, sur la personne de M. Zeller, et sur les principes qui l’ont dirigé dans ses travaux, les quelques détails qu’il nous a été donné de rassembler.

I

Eduard Zeller est né le 22 janvier 1814 à Kleinbottwar, village de Würtemberg, où son père était régisseur d’un grand domaine. Destiné de bonne heure à la carrière théologique, il fit ses premières études dans les écoles würtembergeoises. À dix-sept ans (1831), il entra à l’université de Tübingue comme élève du séminaire de théologie évangélique, et il y passa cinq années (jusqu’au printemps de 1836) à étudier la philosophie et la théologie.

La philosophie lui fut enseignée par le célèbre auteur de la « Vie de Jésus », David Friedrich Strauss, jusqu’en 1833, époque où celui-ci suspendit ses cours, fort suivis d’ailleurs, pour se consacrer tout entier à la composition de son grand ouvrage[2]. David Strauss s’était pénétré surtout des doctrines de Hegel et de Schleiermacher. Il joignait à l’étude approfondie des sources une grande hardiesse philosophique et un remarquable talent d’exposition. Son système consistait à voir dans les dogmes religieux les moments nécessaires de l’évolution de l’esprit pensant. M. Zeller resta Constamment attaché à David Strauss, tant par des liens d’amitié que par la communauté de leurs vues et de leur action scientifiques. Lorsque celui-ci mourut (8 fév. 1874), M. Zeller retraça, dans une sympathique étude[3], la vie et les travaux de son maître et ami ; et il vient, récemment encore, de rendre à la mémoire de Strauss un dernier hommage, en entreprenant (1876) la publication de ses œuvres complètes avec introduction et notes explicatives.

Parmi les professeurs de théologie dont M. Zeller suivit les cours aucun n’eut sur lui une influence aussi durable que le non moins célèbre Ferdinand Baur, fondateur de la « nouvelle école de Tübingue ». Le futur auteur de « l’Histoire de l’église chrétienne » (1833)

  1. Revue Critique, 14 mai 1870, p. 312.
  2. Paru en 1835-1836.
  3. D. F. Strauss in seinem Leben u. seinen Schriften geschildert, 1874.