Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXX.djvu/35

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
25
g. sorel. — contributions psycho-physiques

réjouissant pour le cœur, que l’azur du ciel par un beau jour, bien clair. Cette lumière charmante perd sa valeur en entrant dans nos édifices ; les fenêtres lui donnent une couleur grise et triste ; les pierres, toujours un peu ternies, prennent un aspect cadavérique. Le ton général de coloration, adopté au xiiie siècle, provoque en nous l’idée du grand air et les murailles ne paraissent plus tristes. Les verrières arrêtent beaucoup de rayons ; mais, si elles sont bien traitées, elles donnent une lumière qui semble aussi pleine et aussi resplendissante que celle du plus beau ciel.

D’après les graphiques de M. Féré, le violet ne diffère pas beaucoup du bleu[1] ; son effet est tout autre dans les vitraux ; une coloration violette est déplaisante en général ; elle rappelle le soleil couchant, le moment où notre activité va s’éteindre. Si les vitraux violets sont fortement éclairés, ils sont presque aussi désagréables que les rouges ; aussi ne les emploie-t-on guère que dans les roses, que le spectateur ne voit pas devant lui.

La couleur jaune donne des résultats assez variables ; toutefois elle semble, en général, se rapprocher beaucoup du bleu et elle est bien en dessous du vert[2]. Ce phénomène paraît tout d’abord assez anormal et ne peut guère s’expliquer que par des associations : le jaune, dans bien de ses nuances, rappelle les feuilles mortes et les paysages tristes.

Pour le rouge, les expériences sont toujours concordantes ; c’est la couleur ardente par excellence ; Wundt observe toutefois, avec raison, qu’il perd ce caractère lorsque l’énergie lumineuse est faible. Nous pensons que ce phénomène doit être rapproché de l’aspect de certains paysages d’automne, riches en feuilles rouges, d’un aspect sérieux et glacé, caractérisant une végétation mourante.

Le rouge, qui est d’ordinaire une couleur chaude et saillante, devient, dans les mêmes conditions, une couleur excellente pour faire ressortir les fonds. On sait que les Grecs l’ont employé de cette manière avec le plus grand succès[3].

À notre avis, il faut, dans ces recherches, s’occuper surtout d’associations fondées sur les spectacles naturels. Wundt reconnaît la grande valeur de ce genre de considérations ; il estime que ces rapprochements ont pour effet[4] « de renforcer le sentiment dans une direction, qui lui a été une fois assignée par la nature primitive de la

  1. Revue phil., octobre 1883, p. 354.
  2. Revue phil., octobre 1885, pp. 353-354, — décembre 1887, p. 567. Quand le jaune est orangé, l’effet dynamogène est puissant.
  3. Revue phil., octobre 1886, p. 367.
  4. Éléments, etc., t.  I, p. 549.