Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIX.djvu/69

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
59
B. BOURDON. — la certitude

perceptions comme celle qu’on a quand on regarde un oiseau perché sur une branche, deux objets placés près l’un de l’autre.

La vivacité des images est influencée par diverses causes. Dans la perception, toutes les images, à quelque sens qu’elles appartiennent, sont suffisamment vives pour donner lieu, autant qu’il dépend d’elles seules, à des certitudes.

Mais s’il s’agit de représentations, des différences notables se manifestent entre elles. Abstraction faite des variations individuelles qui peuvent être quelquefois assez grandes, en général ce sont les images visuelles qui se conservent le mieux, avec le plus de vivacité, dans le souvenir. C’est pourquoi on restera longtemps sûr encore, après avoir vu un objet, qu’il se trouve à telle place, a telle forme, tandis qu’on cessera vite de se souvenir de la saveur d’un mets, de l’odeur d’une fleur.

La vivacité des images est en raison inverse du temps écoulé depuis la perception qui les a produites, et par conséquent aussi la certitude.

Une intensité assez grande de ces images peut se maintenir ou se développer dans le souvenir sous l’influence de deux conditions principales, l’intensité considérable de l’impression primitive elle-même, la répétition de la perception primitive ou de l’image de souvenir qu’elle a laissée dans l’esprit. Dans ce dernier cas, non seulement l’image nouvelle avive l’image ancienne, mais elle-même est avivée par celle-ci ; la perception est elle-même avivée par le souvenir. Ces derniers faits expliquent pourquoi toute image correspondant à une tendance mentale soit innée, soit acquise, se trouve en quelque sorte choisie au milieu d’autres et élevée tout de suite à un degré de conscience que les autres ne peuvent atteindre.

Quant à l’image appelée dans une certitude à jouer le rôle de substance, elle est en dernière analyse toujours, de deux qui sont près d’apparaître devant la conscience, celle qui correspond à la plus forte tendance, c’est-à-dire, dans le cas où il s’agit de tendances acquises, celle qui, à côté d’elle, trouve dans l’esprit le plus grand nombre d’idées semblables et vives. Nous laissons de côté en général, en raison du peu de renseignements qu’on a sur ce sujet, l’influence de la nutrition, de la circulation du sang, des excitations inconscientes, quoiqu’il ne soit pas douteux que cette influence existe et qu’il en puisse même résulter des surexcitations locales prolongées de certaines parties du cerveau et par conséquent l’éveil durable de groupes particuliers d’images et de certitudes.

Si l’on ne tenait compte que des répétitions de perceptions, seule une phrase comme la suivante : « Tous les hommes sont mortels »