Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIX.djvu/553

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
543
ANALYSES.fauvelle. La physico-chimie.

sico-chimie, c’est simplement l’explication du monde qu’il va nous donner.

Pour exécuter ce plan, il fallait être universel, aussi le Dr Fauvelle s’est dit : « Je le serai » ; et dix ans après : « Je le suis. » Pendant ces dix années, il a suivi des cours, il a travaillé dans les laboratoires, il est allé partout, sauf à la Sorbonne qu’il méprise, et, un beau jour, il s’est aperçu qu’il possédait des idées précises sur l’ensemble des connaissances humaines. Il a vu alors comment il pouvait opérer la synthèse rêvée, « la lumière a dissipé les ténèbres », ses yeux se sont dessillés », et il a écrit.

Qu’a-t-il écrit ? Tout d’abord, des choses dures pour les philosophes qu’il appelle des ignorants prétentieux, des amis de l’obscurantisme, mais dures surtout pour Descartes.

C’était un élève des jésuites et ce ne fut qu’un faux savant, un ergoteur, un hybride spirituo-matérialiste. Pour l’auteur de la Physico-chimie, le Discours de la Méthode, les Méditations, les Principes de Philosophie n’existent pas. Descartes n’a été qu’un mathématicien, il n’a pratiqué qu’une méthode stérile, la déduction, et le docteur Fauvelle ne connaît en philosophie que la méthode des suppressions.

Spinoza serait moins mal traité, si l’auteur n’avait entrepris de résumer son système ; il nous apprend ainsi que pour Spinoza, il n’existe qu’une substance plus ou moins subtile, que les modifications de l’étendue et de la pensée sont solidaires et non corrélatives. Peut-être répondra-t-il qu’il n’est pas seul responsable de ce résumé et que, pour nous en prévenir, il l’a mis entre guillemets. Il a bien fait, mais pourquoi parle-t-il de la philosophie, s’il ne peut la comprendre que dans les manuels ? Il aurait bien mieux fait de se passer d’introduction. Peut-être sera-t-il plus heureux dans sa physico-chimie ?

Deux substances, la matière et l’éther, composent tout l’univers ; c’est du moins, d’après le Dr Fauvelle, ce qu’affirment les esprit libres d’idées préconçues (lisez religieuses).

Qu’est-ce que la matière et qu’est-ce que l’éther ?

La matière, répond l’auteur, est tout ce qui impressionne nos sens, et sans s’attarder sur la question de nature qu’il ne connaît pas plus que nous, il passe à la constitution qu’il explique par l’atomisme. C’est son droit, mais il en abuse lorsqu’il présente ce même atomisme comme une théorie démontrée. On n’est pas plus à l’aise avec la science, plus libre d’idées préconçues.

Dans les détails, nous retrouverons la même tendance à affirmer, à donner des chiffres précis. Le docteur Fauvelle sait par exemple que le diamètre de l’atome n’est pas sensiblement supérieur à un millionième de millimètre ; il vous dira que l’atome d’hydrogène pèse un cent quarante trillionième de milligramme. Il ajoute, il est vrai, que les calculs préparatoires sont hérissés de difficultés, mais nous devons lui rendre cette justice qu’on ne s’en douterait guère, à voir l’aisance avec laquelle il en manie les résultats.