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ANALYSES.bergson. Données immédiates de la conscience.

êtres, les peuples et les institutions, non pas seulement à l’état statique, mais aussi dans la marche de leur évolution, dans leur genèse et dans leur développement. Dès lors il est inévitable que la psychologie se demande si elle n’est pas plus voisine, par son objet, des sciences de la vie que des sciences physiques proprement dites, et si l’analogie ne lui conseille pas d’abandonner maintenant la conception mécaniste de la vie de l’esprit, pour se la présenter comme un progrès dynamique. Dès lors aussi l’associationnisme semble condamné. Car le rôle d’une hypothèse dans la science n’est jamais indifférent. Dès qu’elle cesse d’être utile, elle est devenue nuisible.

M. Bergson va plus loin. Selon lui, la conception mécaniste ou associationniste de l’âme étant écartée, et le dynamisme interne reconnu, la liberté apparaît, évidente. Car « nous sommes libres quand nos actes émanent de notre personnalité entière, quand ils ont avec elle cette indéfinissable ressemblance qu’on trouve parfois entre l’œuvre et l’artiste » (p. 131). C’est une liberté bien douteuse, car savons-nous ce qu’est cette personnalité ? D’où nous vient-elle ? Est-elle notre œuvre ? Et pouvons-nous dire « moi » de tout notre moi ? M. Bergson pressent l’objection, et il ajoute : « En vain on alléguera que nous cédons alors à l’influence toute-puissante de notre caractère. Notre caractère, c’est encore nous… En un mot, si l’on convient d’appeler libre tout acte qui émane du moi, et du moi seulement, l’acte qui porte la marque de notre personne est véritablement libre, car notre moi seul en revendiquera la paternité. » Mais peut-on accepter cette définition de la liberté ? M. Bergson, en la formulant, veut surtout faire ressortir comment sa théorie de la durée réelle enlève au déterminisme toute raison d’être. En effet, dans cette théorie, une solidarité nécessaire entre le moment présent et le moment qui suivra est inconcevable. Il n’y a pas d’avenir objectif, si j’ose dire, puisque, en dehors de la conscience, il n’existe c[ue des simultanéités sans succession. La conscience dure, il est vrai, mais elle dure comme « hétérogénéité absolue », autre à mesure qu’elle vit, imprévisible par conséquent. Dès lors, ce qui est difficile, ce n’est pas de concevoir comment le moi peut être libre, mais bien comment il pourrait ne pas l’être.

Que devient alors la causalité ? M. Bergson a bien vu que là était tout le nœud du problème. Une théorie du temps implique une théorie de la causalité. Ces trois questions, temps, causalité, liberté, sont si étroitement connexes, que toute solution de l’une impose une solution des deux autres. Ainsi les philosophes et théologiens qui admettaient a priori la prescience divine, ne pouvaient ensuite, par aucun effort de dialectique, concilier avec elle la liberté humaine ; ainsi Kant, considérant tous les phénomènes donnés dans le temps comme soumis à la loi de causalité nécessaire, n’hésite pas, pour sauver la liberté, à la placer dans le monde des noumènes : — non plus le monde intelligible de Platon, mais au contraire le monde inintelligible.

M. Bergson analyse l’idée ou plutôt les idées de causalité, car il en