En ce qui concerne la nature et l’origine du sexe, quelques faits doivent être rappelés. Chez les animaux unicellulaires, le corps et la cellule reproductrice ne sont qu’un. Mais déjà chez les Protozoaires, colonies de cellules, apparaît la différence, qui deviendra si considérable dans les organismes supérieurs, entre les cellules reproductrices et les cellules somatiques. L’hermaphroditisme semble être le fait primitif, avec ses divers modes. Les éléments mâle et femelle ont commencé par coexister sur le même individu ; œuf et sperme sont produits en un rythme alternant, le même individu est alternativement mâle et femelle. La séparation des aires sexuelles, la distinction entre les deux porteurs du sexe, est l’événement ultime. La fécondation croisée dans les plantes, notons-le en passant, n’aurait pas du tout, d’après MM. Geddes et Thomson, la valeur que lui accorde Darwin. Elle ne serait pas aussi commune qu’il le supposait ; elle ne serait d’aucun bénéfice matériel pour la race, tout au contraire. La difficulté de l’autofécondation viendrait enfin de troubles physiologiques sans aucun rapport avec la propriété générale des plantes comme espèce.
Nous touchons ici au vif de la question. Le lecteur trouvera, soit dans l’article précité de M. Balbiani, soit dans l’ouvrage qui nous occupe, l’énoncé des hypothèses diverses émises sur ce grand sujet, la continuité de la vie, par Oken, par Häckel, par Brooks, par Jäger, par Galton, par Nussbaum, et plus récemment par Weismann. Arrêtons-nous un moment à ces derniers.
Nussbaum avait appelé de nouveau attention, en 1880, sur quelques cas de séparation précoce des cellules reproductrices, et il avait soutenu, avec Jäger, que la substance germinative se transmet directement d’un œuf à un autre œuf, qu’il y a continuité des éléments sexuels. On aurait ainsi une chaîne continue de cellules reproductrices, tout à fait à part du corps : elles seraient comme le fil d’un collier dont les pendeloques seraient représentées par les individus. Certes, si cela était vrai dans tous les cas, le problème de la reproduction et de l’hérédité serait plus simple qu’il ne paraît aujourd’hui. Mais cela n’est vrai que pour un petit nombre d’espèces, telles que les Diptères, chez lesquels les cellules sexuelles se forment dès le début du développement de l’œuf. À l’ordinaire, elles apparaissent plus tard ; elles ne proviennent pas de l’œuf, mais de cellules somatiques, d’un tissu épithélial, par exemple, comme chez les Hydraires et les Vertébrés. La continuité des cellules germinatives n’est donc pas soutenable. Weismann insiste pourtant sur la continuité de l’œuf à l’œuf, et il la justifie par sa conception du plasma germinatif. Ce plasma est la portion essentielle du nucleus