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B. BOURDON. — LA CERTITUDE

II

Telle est l’idée générale qu’on se fait ordinairement de la certitude. Nous allons maintenant examiner avec quelques détails les influences susceptibles de favoriser ou d’entraver la formation de cette certitude.

D’abord on peut faire remarquer que tout état fort remplit généralement, en tant que fort, l’une des conditions fondamentales requises pour qu’il y ait vérité, savoir celle qui résulte de la nécessité que les images associées ou dissociées soient intenses. Cependant, même dans la perception, l’intensité des images, sans descendre jamais au-dessous d’un certain degré considérable de vivacité, peut varier entre des limites assez étendues. C’est ainsi que l’intensité d’un son actuellement perçu peut passer par des degrés nombreux. Or, on constate que la certitude subit l’influence de ces variations d’intensité, et même que, dans des cas exceptionnels, on peut arriver, si les images perçues deviennent trop faibles, à se demander si l’on a vraiment aperçu tel phénomène, entendu tel son.

La qualité des sensations exerce une certaine influence sur la certitude en raison de ce fait qu’elle n’est pas sans rapports avec l’intensité. Ainsi la couleur blanche, par cela seul qu’elle est blanche, produit une sensation plus intense que la couleur noire. De même un son très élevé qui touche presque aux limites de la perception des hauteurs de son ne donne lieu, par le fait de son extrême hauteur, qu’à une image peu intense et conséquemment, si nous nous appliquions à l’observation de sons semblables, il nous arriverait parfois de douter si nous les avons réellement entendus. Des sons très bas sont plus difficilement distingués les uns des autres que des sons de hauteur moyenne.

De ce fait que l’intensité dépend de la qualité des sensations et par conséquent de la qualité des images qu’elles laissent dans l’esprit résulte une conséquence importante. C’est que, naturellement, l’homme a une tendance à subordonner certaines classes d’images à d’autres, à considérer les connaissances où prédomine telle catégorie particulière d’images comme d’ordre supérieur aux autres. Chez la plupart des hommes, sinon chez tous, cette catégorie d’images auxquelles se subordonnent les autres ce sont les images visuelles. Les objets, le monde dans son ensemble, se présentent avant tout, ordinairement, à l’esprit comme des systèmes d’images visuelles, et c’est ce qui se remarque à ces termes relativement si nombreux de