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tionnelle est tellement remarquable qu’il est inutile de le signaler davantage.

Nous constatons ensuite qu’il y a toujours au moins deux images simultanément ou à peu près simultanément présentes. On voit que tel homme rit, que telle maison a deux cheminées. Bref, la certitude est en général la perception d’une certaine relation entre deux phénomènes ou groupes de phénomènes. Dans cette perception d’une relation, il est à remarquer que les deux phénomènes ou groupes de phénomènes ne jouent pas tout à fait le même rôle. L’un d’eux est considéré comme donné, comme point de départ, et c’est à lui qu’on rapporte l’autre. Pour employer deux termes scolastiques, l’un joue le rôle de substance et l’autre d’accident ; ainsi l’homme, dans : « Cet homme rit », joue le rôle de substance, le rire représente l’accident. Aucun phénomène ou groupe de phénomènes n’a d’ailleurs en lui rien qui le caractérise essentiellement comme substance ou comme accident ; le rire peut, dans le cas précédent, être pris comme substance, comme quand on dit : « Le rire de cet homme… » Nous verrons plus loin quels motifs peuvent nous déterminer à prendre tantôt un phénomène, tantôt l’autre, comme substance. La formule suivante est vraie de tous les cas : Le phénomène qui, dans une certitude, est appelé à jouer le rôle de substance est celui qui se présente à l’esprit avec le plus de rapidité et d’intensité. Et comme l’accroissement de rapidité et l’accroissement d’intensité sont en général proportionnels entre eux, on peut simplement dire, en conservant la seule idée de rapidité qui est plus claire que celle d’intensité : Dans une certitude, la substance est constituée par le phénomène qui se présente le premier à l’esprit. Cette formule devient en grammaire naturelle : Le sujet et le substantif véritables sont constitués par les mots qui se présentent les premiers à l’esprit. Ces mots sont aussi ceux qu’on exprime les premiers, quand la discipline apprise à l’école le permet et ceux sur lesquels on place l’accent d’intensité ou l’accent de hauteur, ou les deux à la fois. Ainsi, au lieu de cette phrase : (c Je suis allé en chemin de fer à Paris », nous ferons la suivante, si la substance véritable est en chemin de fer : « C’est en chemin de fer que je suis allé à Paris ». Dans le langage populaire surtout, le premier mot est presque toujours celui qui correspond à la première idée apparue. Ainsi, nombreuses y sont les phrases comme la suivante : « Moi, ces gens-là, je n’en ai pas peur », laquelle est parfaitement conforme aux règles de la syntaxe naturelle.

Être certain, c’est donc être certain que l’accident se rapporte à la substance, celle-ci étant considérée comme donnée et mise