d’activité en subissant l’action que d’autres êtres, par exemple d’autres hommes, exercent sur vos sens. — Mais me sentir passivement modifié ne m’apprendra pas l’existence d’une activité autre que la mienne, si je n’ai préalablement aucune expérience d’activité et d’activité mienne. Si je ne distingue pas le mouvement de mon bras, quand il est voulu par moi, du mouvement de mon bras contraint, je n’attribuerai jamais ce dernier à une action, à une volonté étrangère. C’est donc dans notre conscience seule que nous prenons l’idée et le type d’une action causale, c’est dans la tension de la volonté, suivie de détente et de déploiement, que nous trouvons notre expérience de l’agir, sans laquelle, encore une fois, ce mot ne serait plus qu’un terme abstrait dénué de sens. En aucun cas il n’est logique de dépouiller les faits de conscience de toute efficace pour admettre ailleurs une efficace dont nous n’avons plus alors aucun exemple connu, et surtout pour attribuer cette efficace à un troisième terme non moins inconnu, non moins inconnaissable ; on aura beau prétendre que ce terme est tout en dehors de notre conscience, nous répéterons que notre conscience seule le pose, sans que l’on comprenne où elle en a pu prendre les éléments constitutifs.
Dès lors, il ne nous reste d’autre alternative que d’attribuer l’activité au contenu de la conscience. En fait, c’est parce que nous accordons à notre volonté une part quelconque dans nos mouvements corporels que nous interprétons les mouvements extérieurs, surtout ceux des êtres animés, par une volonté plus ou moins analogue à la nôtre. — Mais précisément, objecte-t-on, vous n’avez point l’expérience d’une réelle efficace de votre volonté. Vous voyez seulement le mouvement suivre ou accompagner telle volition, mais vous ne voyez pas comment votre volition meut. Nous répondrons qu’il faut distinguer le mouvement tel qu’il est perçu et le mouvement s’exécutant. Le mouvement tel qu’il est perçu est une simple représentation dans la conscience, un simple fragment du contenu total de la conscience ; la volition ne produit pas directement et ne peut pas se voir produire le mouvement perçu. Mais, s’il n’y a pas action transitive de la volition sur la perception de mouvement, qui n’est qu’une sorte de choc en retour, il peut y avoir influence de la volition sur le mouvement s’effectuant, action immanente par laquelle la volition est elle-même processus moteur, identité profonde du désir et de l’agir, du vouloir et du mouvoir. En saisissant le vouloir, nous saisirions ainsi le réel de la motion même, son actuation. En fait, le mouvement n’est pas d’un côté et l’appétition de l’autre, comme deux courants divers qui tantôt se sépareraient, tantôt viendraient se réunir par accident ; il y a un seul et