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A. FOUILLÉE.l’évolutionnisme des idées-forces

En premier lieu, l’excitation peut être assez modérée pour ne dépasser que faiblement ce que les psycho-physiologistes appellent « le seuil de la conscience » ; il en résulte alors une modification voisine de l’indifférence au point de vue de la sensibilité. Cette excitation, très faiblement agréable ou très faiblement pénible, prend plus particulièrement le nom de sensation primaire. La réaction émotionnelle et appétitive qu’elle provoque est si faible, qu’elle expire presque en naissant et se perd dans la masse des impressions qui se contre-balancent.

En second lieu, si l’excitation est plus énergique, elle intéresse par diffusion nerveuse un grand nombre d’éléments et le cerveau tout entier ; elle peut intéresser la vie même, dont le cours est favorisé ou contrarié. Il se produit alors la conscience d’une action générale exercée sur notre vie par le milieu extérieur et d’une réaction générale du dedans vers le dehors : c’est l’émotion, avec ses deux formes du plaisir et de la douleur.

En troisième lieu, l’émotion ainsi définie provoque nécessairement l’appétition et s’accompagne d’une série de mouvements qui se répandent de toutes parts. Ces mouvements d’appétition et de réaction générale, qui constituent le dernier stade du processus mental, se manifestent eux-mêmes sous diverses formes, selon qu’ils sont plus ou moins énergiques. À leur premier degré, ils n’apparaissent au-dehors que comme mouvements généraux d’expression. À un degré supérieur, ils deviennent impulsions particulières, c’est-à-dire que la réaction, au lieu de rester générale, se détermine dans une certaine direction, qui est la plus propre à retenir le plaisir ou à écarter la douleur. Dans l’ensemble des mouvements faits d’abord au hasard par l’animal, il y en a qui s’adaptent à ce résultat ; ces mouvements sont triés par sélection, et ils aboutissent les uns aux efforts musculaires, les autres aux actions réflexes proprement dites. Il y a alors action proprement dite, action dirigée vers le but, conscient ou inconscient, d’écarter la douleur, de conserver le plaisir, de protéger la vie et la volonté primitive. On voit de nouveau que, grâce à l’irradiation plus ou moins intense et étendue du mouvement appétitif dans l’organisme, tous les éléments essentiels de la fonction mentale doivent se trouver mis en jeu à des degrés divers ; celui qui prédomine impose son nom à l’ensemble, mais, encore une fois, ils sont toujours tous présents.

Ainsi chaque état de conscience détermine des mouvements pour deux raisons, l’une mécanique, l’autre psychologique : 1o parce que chaque état de conscience a pour concomitant mécanique un ensemble de mouvements qui ne peuvent tout d’un coup disparaître ;