et représentative du sujet, non en qualité objective et représentative de l’objet. S’il n’y avait qu’intensité dans la sensibilité, le plaisir intense ne différerait pas qualitativement de la douleur intense, ou n’en différerait que par des qualités représentatives concomitantes ; ce qui est absurde. L’appétition est, plus évidemment encore, une réaction du sujet conscient (de quelque manière qu’on se représente la nature métaphysique de ce sujet) ; c’est la réponse du dedans au dehors, dont l’attention est la forme intellectuelle, dont le plaisir ou la douleur est la forme émotionnelle. Le subjectif, c’est-à-dire le sentiment et l’appétition, est donc un élément essentiel à la psychologie, qui ne peut se résoudre tout entière en une étude de représentations et d’idées sans force. Il est vrai que tous les faits de conscience, pour pouvoir devenir objets de science, doivent prendre la forme de représentations et d’idées ; mais il faut que le psychologue maintienne toujours, sous cette forme représentative, le fond appétitif et conséquemment actif. Toute idée doit, pour lui, envelopper le processus à la fois sensoriel, émotionnel et volitionnel ; dès lors, au lieu d’idées immobiles et inertes, statiquement considérées, il considérera dynamiquement des idées en action, des idées-forces. Ainsi reparaîtra dans l’ordre mental la vie, c’est-à-dire l’activité interne.
V. — La dernière conclusion de la psychologie des idées-forces, conclusion qui ressort de tout ce que nous venons de dire, c’est le caractère primordial et irréductible de la volonté ou appétit. Si les idées sont des forces mentales, c’est parce qu’elles sont des directions de la volonté d’abord sourdement conscientes, puis se multipliant par la conscience plus vive qu’elles acquièrent. Une idée abstraite, formelle, un pur cadre n’a de force que comme un cadre peut en avoir, une force de délimitation et de régularisation, mais non d’impulsion véritable ; pour être une idée-force, il faut que l’idée soit une pensée vivante, conséquemment sentante, désirante et agissante.
De quoi avons-nous conscience, en définitive ? De vouloir. La conscience est la manière dont l’être s’apparaît à lui-même, la volonté est la manière dont l’être agit et existe. Si la forme essentielle de notre existence est la pensée consciente, le fond de notre existence est l’action déterminée par l’appétition de quelque bien et jointe au sentiment de quelque bien. Activité et sensibilité se pénètrent, se supposent, sont les deux aspects d’un seul et même vouloir. Nous sentons parce que nous désirons, parce qu’il y a en nous appétit favorisé ou contrarié, volonté satisfaite ou non satisfaite. L’évolution de la conscience recouvre une évolution de la volonté. Les sentiments particuliers et les désirs particuliers ne sont que des exsertions