Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIII.djvu/635

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
625
histoire et philosophie religieuses

de la lumière, tenue pour incréée par les sectateurs de Zoroastre ; celle-ci est mise à la place d’honneur et l’ensemble du récit reçoit, à ce moment, la disposition sous laquelle le texte nous est parvenu. En d’autres termes, le fiat lux » serait le résultat d’une introduction et d’un remaniement passablement postérieurs à la première rédaction du récit. La proposition est séduisante ; cependant, quand on y regarde de près, on ne tarde pas à s’apercevoir qu’elle se heurte à d’assez grosses difficultés. Nous avons eu l’occasion de reprendre à nouveau et tout récemment l’examen de ce texte et cette étude ne nous a pas rendu favorable à l’hypothèse d’un remaniement. Le texte que nous avons sous les yeux est, selon nous, une page dont il n’y a pas de raison décisive de suspecter l’intégrité. Quant à sa date, nous la croyons des temps de la restauration, du ve siècle, par exemple, avant notre ère. L’écrivain qui a tracé ce tableau en traits aussi fermes que sobres, témoigne d’une culture philosophique et littéraire singulièrement haute.

Nous acceptons, en revanche, la proposition que fait M. d’Eichthal de tenir pour une interpolation la fameuse déclaration d’Exode, III, 14 : « Je suis celui qui suis. Tu diras aux enfants d’Israël : Je suis m’a envoyé vers vous. » C’est là, comme il l’établit fort bien, une définition métaphysique de la divinité, introduite à une date récente pour combler une lacune que les esprits distingués commençaient de ressentir au contact de la philosophie étrangère.

Mais ce qui constitue le plus vif intérêt de ce volume de Mélanges, ce sont les parties consacrées au Deutéronome. On nous donne ici une étude critique sur la composition et l’origine du cinquième des livres du Pentateuque, suivie d’une traduction du livre selon l’ordre du texte traditionnel et de la même traduction rangée selon l’ordre restitué par l’auteur, puis d’un commentaire explicatif. Le Deutéronome, tout au moins le noyau de ce livre (chap.  iv, 44 à xxvi, fin), passe pour une œuvre compacte dont les parties sont intimement liées entre elles. C’est à cette prétendue unité que M. d’Eichthal s’attaque. Il signale un certain nombre de morceaux de médiocre étendue qui s’accordent assez mal à leur contexte et réclame qu’on les écarte. Mais surtout il conteste que les chapitres v à xi, contenant une sorte d’homélie ou de discours parénétique, doivent être tenus pour la préface et l’introduction de la collection des lois qui s’étend de chap.  xii à xxvi. D’après lui, ce discours et cette législation ont existé à l’origine d’une manière indépendante. Au premier abord, cette vue ne laisse pas de surprendre. On s’est accoutumé à considérer ce qui précède la législation deutéronomique proprement dite comme faisant corps avec elle. Quoi de plus naturel qu’un commentaire ému et éloquent placé en tête d’un code pour en marquer avec autorité l’esprit et l’intention ? Fort bien, si la prétendue préface est d’accord avec la législation. Mais l’examen montre qu’elles s’appliquent l’une et l’autre à des objets sensiblement distincts.

Le discours parénétique (chap.  v à xi), remarque justement