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mais beaucoup moins marqués. Au reste, je dois ajouter que chez les trois sujets sur lesquels j’ai opéré, la suggestion à l’état de veille ne m’a rien donné, de quelque appareil que j’eusse soin de l’entourer. Ce n’est là bien entendu qu’une vérité toute relative ; un autre opérateur, avec plus d’autorité ou de persistance, pourrait réussir là où j’ai échoué.

La dynamogénie produite par l’excitation périphérique est un peu différente de la dynamogénie produite par la suggestion. Dans le premier cas, il s’agit d’une force diffuse dans tout l’organisme ; lorsqu’on soumet une hyperexcitable à l’action des rayons rouges, il se produit, comme M. Féré l’a bien montré, une excitation dans tous les organes. La suggestion, au contraire, développe un courant qui a une direction unique. En un mot, l’excitation périphérique correspond à une excitation diffuse, et la suggestion à une excitation localisée.

Beaucoup de personnes recherchent, sans en avoir conscience, les excitations périphériques pour augmenter l’intensité des images mentales. Le goût des névropathes pour les couleurs vives et pour toutes les sensations nouvelles tient en grande partie à cette cause. M. Féré ayant très bien étudié ce sujet, nous n’insistons pas. Nous soulignerons seulement un fait qui ne manque pas d’intérêt. On a remarqué que ceux qui se livrent à des attentats aux mœurs de diverse nature ont souvent le soin de choisir pour cadre à leurs attentats certains lieux où ils risquent d’être arrêtés, mais où ils savent que la disposition des objets, ou tout simplement la crainte d’être pris en flagrant délit auront pour effet de donner un coup de fouet à leur imagination ; on sait, du reste, que pour un certain ordre de crimes, l’imagination a autant et plus de place que les sens. On comprend ainsi comment il peut arriver que l’auteur de l’attentat ne cherchera pas le silence et l’isolement pour commettre son crime ; dans le silence et dans l’isolement, son imagination serait paresseuse, et, par conséquent, son crime manquerait de saveur ; il préférera faire comme cet instituteur, dont l’histoire nous revient à l’esprit, et qui commettait son attentat pendant la classe, derrière son bureau. Ces monstruosités s’expliquent, à notre avis, par des raisons psychologiques ces sujets comprennent d’une façon plus ou moins consciente l’influence que les excitations périphériques exercent sur les images mentales.

3. — Nous venons de voir deux causes de dynamogénie de l’image : la suggestion, c’est-à-dire l’association des idées, c’est-à-dire une excitation localisée, et l’excitation périphérique, c’est-à-dire une exci-