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REVUE GÉNÉRALE.marillier. La suggestion mentale, etc.

en l’air[1]. » — Voilà bien des raisons pour ne se rendre qu’à l’évidence et n’admettre qu’à la dernière extrémité la suggestion mentale. Cependant les expériences du Dr Baréty (de Nice), de M. Ch. Richet, sans paraître démonstratives à M. Ochorowicz, l’engagèrent à continuer ses recherches : il put lui-même faire quelques expériences sur le sujet du Dr Baréty, mais elles donnèrent des résultats confus, difficiles à interpréter. Il a entrepris alors de vérifier les expériences de la « Society for psychical research ». Le sujet sur lequel il a opéré était une dame, âgée de soixante-dix ans, sensible à l’hypnoscope, c’est-à-dire, d’après M. Ochorowicz, hypnotisable, et fort intelligente.

Une série de trente et une expériences (consistant à deviner un objet, une couleur, un chiffre, une carte, etc.) a donné treize succès. Mais là encore on peut se demander, et c’est ce que fait M. Ochorowicz, si la réussite n’a pas été due à un enchaînement d’associations qui amenait le sujet à penser précisément au même objet que l’expérimentateur. Il cite une série de trois expériences qui indique bien comment peut fonctionner ce mécanisme :

[texte quelconque à insérer] OBJET PENSÉ. Rouge Le lilas. Mme J. (Une couleur) (Une fleur) (Une personne présente) OBJET DEVINE. Rose Le lilas. M. D.

« On prévient le sujet qu’il s’agit d’une couleur, il ne la devine qu’approximativement : c’était rouge, il devine rose. Rose, qui est en même temps le nom d’une fleur, nous suggère à nous tous l’idée d’une fleur. On prévient le sujet qu’il s’agit d’une fleur. Le lilas se trouve au milieu de la table : tout le monde l’avait remarqué, il se présente le premier à l’esprit de tout le monde. Puis, dès qu’il s’agit d’une idée un peu plus éloignée et où la probabilité reste toujours assez forte (il n’y avait qu’une dizaine de personnes), il y a échec[2]. » D’autres séries d’expériences ont donné des succès plus complets à M. Ochorowicz sans que la réalité de l’action mentale lui fût pour cela démontrée : il lui semblait toujours possible que le sujet devinât sa pensée, grâce à une même série d’associations, grâce aussi à des signes involontaires, inconsciemment donnés, inconsciemment interprétés. C’est au-dessous de la conscience que s’accomplit tout ce sourd travail dont nous ne saisissons le plus souvent que les résultats ultimes, qui nous semblent alors merveilleux.

M. Ochorowicz comprit que c’est en s’adressant à des phénomènes très simples, à des phénomènes de mouvement qu’il aurait chance de travailler utilement à la solution du problème qui le préoccupait. Il pourrait se placer alors dans des conditions telles qu’aucune suggestion involontaire ne pourrait atteindre le sujet. Il a fait sur une malade, Mme M., une série de 41 expériences du 2 décembre au 24 janvier.

  1. Ibid., p. 46
  2. Ibid., p. 74