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PICAVET.le phénoménisme et le probabilisme

Enfin quelques indications dans ses autres ouvrages, dans le de Fato (la critique de la théorie stoïcienne sur le Destin) ; dans le premier livre du de Divinatione ; dans le de Republica (fragm. III, 6, sqq.) ; le de Oratore (I, 11), etc.

Sextus a exposé les théories de Carnéade dans les deux livres contre les Logiciens (VII et VIII) ; dans le livre IX contre les Physiciens, où il emprunte à Clitomaque les arguments par lesquels il combat la théorie stoïcienne sur la nature des dieux[1]. Enfin dans les Institutions pyrrhoniennes, il a établi la différence (III, 226, sqq.) entre la Nouvelle Académie et le scepticisme.

Aux témoignages de Cicéron et de Sextus, il convient de joindre les témoignages plus incomplets, mais précieux encore, de Lactance (Instit., V, 14, 16, etc.) ; de Stobée (Floril., 119, 19) ; d’Aulu-Gelle (N. a., VI, 14, 10) ; de Plutarque (Quæst. conv., VIII, 1, 2 ; Tranq. an., 16, etc.) ; de Diogène Laërce (IV, 62, 66), de Numénius (Eus. Prep. ev., XIV, 8, 2, 5 sqq.) ; de saint Augustin (Contra Academicos) ; de Strabon, etc.

Nous savons peu de choses sur la vie de Carnéade. Son père s’appelait Epicome ou Philicome[2] ; il naquit comme Lacydes à Cyrène ; de même que Platon, il était né le jour de la fête d’Apollon (Κάρνεια)[3]. Il vint à Athènes, et y fut le disciple, puis le successeur d’Hégésinus à l’Académie[4]. Mais, en même temps, il reçut l’enseignement de Diogène qui lui fit connaître la dialectique stoïcienne[5]. Il lut les ouvrages des Stoïciens et surtout de Chrysippe ; il reconnaissait lui-même tout ce qu’il devait à ce dernier, et l’affirmait, en parodiant le vers célèbre par lequel les Stoïciens manifestaient leur admiration pour Chrysippe : « Si Chrysippe n’eût pas existé, disaient-ils, le Portique n’eût pas existé ». « Si Chrysippe n’eût pas vécu, répétait souvent Carnéade, je n’eusse pas été moi-même[6]. »

Son goût pour l’étude était si vif qu’il refusait de prendre part à tous les festins auxquels on l’invitait, et laissait croître sa barbe et ses ongles[7]. Une éloquence merveilleuse[8], une présence d’esprit rare[9], une dialectique pressante, une voix forte et sonore, une habileté incomparable pour interroger ses adversaires, une verve

  1. Nous l’établirons par la suite à propos de chacune des théories exposées.
  2. Diog., IV, 62, d’après Alexandre.
  3. Plutarque, Quest. conv., VIII, 1, 2, 1.
  4. Cicéron, loc. cit.
  5. Cic., Acad. pr., II, 31, 98.
  6. Diog., IV, 62.
  7. Diog., IV, 62.
  8. Cicéron, Plutarque, Numénius.
  9. Cf. sa réponse au préteur Albinus.