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GAROFALO.le délit naturel

part d’un citoyen, etc. Nous n’avons qu’à répéter que l’opinion publique se refusera toujours à voir un crime et un criminel là où il n’existe pas d’offense au sens moral universel.

V

Quel est donc notre cadre de la criminalité ? Nous l’avons rangée sous deux catégories très larges, selon que l’offense est faite principalement à l’un ou à l’autre des deux sentiments altruistes primordiaux, quoique les actions coupables attaquent des droits de différentes espèces et soient classées dans les codes sous différents titres.

C’est ainsi que la première catégorie, l’offense au sentiment de pitié ou d’humanité, contient d’abord les ''agressions à la vie des personnes, et toutes sortes d’actions tendant à leur faire un mal physique, ainsi donc les blessures, les mutilations, les mauvais traitements entre père et enfants, mari et femme, les maladies causées volontairement, l’excès de travail imposé à des enfants ou la spécialité d’un travail capable d’endommager leur santé ou d’arrêter le développement de leur corps (ces dernières actions ne figurent pas dans les codes, ou, tout au plus, sont-elles rangées parmi les contraventions) ; ensuite les actes physiques qui produisent une douleur en même temps physique et morale, comme la violation de la liberté individuelle pour un but égoïste quelconque, soit la luxure ou le gain ; ainsi la défloration, le rapt sans consentement, l’emprisonnement arbitraire, etc., — enfin les actes qui par un moyen direct produisent nécessairement une douleur morale, comme la calomnie, la diffamation, la séduction d’une jeune fille moyennant tromperie.

Dans la seconde catégorie, l’offense au sentiment élémentaire de probité, nous avons rangé : d’abord, les agressions violentes à la propriété, comme le vol, l’extorsion, la dévastation, l’incendie ; ensuite, les agressions faites sans violence, mais par abus de confiance, comme l’escroquerie, l’infidélité, l’insolvabilité volontaire, la banqueroute, la violation d’un secret, le plagiat, et toutes sortes de contrefaçons nuisibles aux droits des auteurs ou des fabricants ; enfin les lésions indirectes à la propriété ou aux droits civils des personnes moyennant des mensonges solennels, comme les faux témoignages, les faussetés dans les actes authentiques, la substitution d’un enfant, la suppression d’état civil, etc.

Nous avons laissé hors de notre cadre d’abord, les actions qui