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dire de l’accélération. Donc, la direction et la grandeur de l’accélération dépendent du choix du mouvement unité.

Ces définitions posées, prenons comme mouvement unité la rotation terrestre, ce qui nous ramène à la mesure ordinaire du temps, et examinons, dans cette hypothèse, les mouvements de la matière ; nous arrivons alors à cette loi générale :

« Quand deux corps sont en présence, ils se mettent en mouvement et à chaque instant l’accélération de chacun des deux mobiles est toujours dirigée vers l’autre mobile. »

Or, nous savons qu’en changeant de mouvement unité nous modifions la direction des accélérations ; donc la loi ci dessus vérifiée pour un mouvement unité particulier, la rotation terrestre, cesserait de l’être pour tout autre. Dès lors, nous avons une raison vraiment scientifique de choisir, comme mouvement unité, cette rotation, parce que ce choix nous donne la loi très remarquable que nous venons d’énoncer et nous la donne seul.

Sans nous étendre davantage sur ce sujet que nous avons développé longuement dans notre « Étude critique sur la mécanique », nous dirons pour conclure :

Au point de vue de la mesure du temps, la mécanique se divise en deux parties : l’une, où n’intervient pas la loi précédente relative à la direction des accélérations de deux mobiles, est vraie quelle que soit la mesure du temps ; l’autre, au contraire, suppose cette loi et est liée au choix de la rotation terrestre comme mouvement unité. Nous voyons ainsi quelle est en mécanique l’exacte portée de ce choix et comment il se justifie d’une façon rigoureusement scientifique.

IV. De la force.

C’est une idée empruntée à la philosophie la plus ancienne que la force est la cause du mouvement : scientifiquement, cette idée n’a aucune valeur. Ainsi que nous le disions précédemment à propos des accélérations, il y a mouvement quand deux portions de matière sont en présence : voilà donc la seule cause immédiate du mouvement et, en science, la cause immédiate d’un phénomène est la seule qu’il y ait lieu de rechercher. Tous les mécaniciens, croyons-nous, inscrivent en tête de leurs ouvrages que la force est la cause du mouvement, et cependant cette idée leur est tellement inutile que ces ouvrages se comprennent aussi bien lorsqu’on fait l’hypothèse inverse que la force est la conséquence du mouvement. Du reste, Euler avait déjà fait remarquer que cette idée de causalité disparaît