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même de n’accueillir qu’avec la plus grande réserve et après examen très minutieux toutes les notions qui se rattachent ou paraissent se rattacher aux mouvements de notre planète.

Voyons donc s’il ne serait pas possible d’aborder la mécanique en laissant de côté ce sentiment de la durée mesurable, quitte à le reconstituer plus tard sur des bases vraiment scientifiques.

III. Des propriétés de la rotation terrestre.

Ainsi que nous venons de le voir, le sentiment de la durée mesurable se rattache à la rotation de la terre ; une rotation complète représente un jour ; la vingt-quatrième partie de cette rotation représente une heure ; enfin les minutes et les secondes sont encore des subdivisions de cette rotation : la durée d’un mouvement est dès lors la mesure de l’angle dont tourne la terre pendant que ce mouvement s’effectue ; de sorte qu’évaluer la durée des divers mouvements, c’est comparer tous ces mouvements à la rotation de la terre. Si maintenant nous nous affranchissons du point de vue particulier qui a été adopté jusqu’ici, nous pourrons dire, d’une façon générale : mesurer la durée des mouvements c’est les comparer à un seul d’entre eux, considéré en quelque sorte comme mouvement unité. Le problème est ainsi posé d’une façon vraiment scientifique, car il est aussi logique de comparer tous les mouvements à un d’entre eux que de comparer en géométrie toutes les grandeurs de même espèce à une seule d’entre elles prise pour unité. Le mouvement unité nous présentera une grandeur variable, une longueur s’il s’agit d’un point décrivant une trajectoire, un angle s’il s’agit d’un corps en rotation, et c’est cette grandeur variable qui sera la mesure du temps.

Mais, nous dira-t-on, ce mouvement unité est-il donc absolument arbitraire ? C’est l’étude de la mécanique qui nous l’apprendra, mais au début nous n’en savons rien. En réalité, les faits astronomiques que nous allons étudier ne dépendent en rien, quant au fond, du choix de ce mouvement unité ; exprimer ces faits à l’aide de tel ou tel mouvement unité, c’est raconter les mêmes événements dans des langues différentes, mais le choix de cette langue est important au point de vue de la simplicité et de la concision.

Nous acceptons donc au début de la mécanique cette indétermination absolue du mouvement unité et nous ne sortirons de cette indétermination que si nous sommes amenés à le faire pour donner à nos formules, à nos théorèmes, une forme plus simple et plus remarquable.