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ANALYSES.sc. novanticus. Metaphysica nova et vetusta.

dans ce moi-détermination avant tout pour s’affirmer lui-même comme la réalité immanente au sein de l’universelle sphère de l’actuel et du possible. Bref ce moi-détermination, c’est (comme nous l’avons expliqué) l’universel mouvement, raison de ce cosmos se réfléchissant en lui-même au foyer de cet organisme qu’on appelle l’homme. Organisme qui soutient au même moment des relations d’antagonisme avec le non-lui tant universel que particulier. D’où suit qu’il est en cela et par là même fini et conditionné. Et c’est ce que l’on veut exprimer, quand on dit de l’homme qu’il est créé à l’image de Dieu.

« Mais revenons à l’argument kantien, que le concept fondamental de la psychologie — moi — est obtenu par une illégitime application de la catégorie de l’unité à la conscience, les catégories n’étant applicables qu’aux données des sens seulement. La réponse à faire, c’est : 1o que la conscience du moi n’est pas un concept, mais un percept ; 2o c’est l’unité de la conscience qui seule constitue et rend possible l’application fonctionnelle du concept d’unité dans toute connaissance, parce qu’elle est le prius exigé de cette fonction ; 3o le fait de cette unité, déjà existante et sentie, n’est pas constitué par l’acte perceptif, mais purement amené à la lumière de la conscience par l’acte de volonté qui s’empare de ce fait, comme il s’empare de tout autre.

« Pour conclure, le mouvement cinétique spontané — dit volonté — qui émerge de ce qui a été jusqu’alors la conscience purement attuitive et animale ; qui, grâce aux ressources d’une marche dialectique, médiatise et subsume la matière de toute connaissance, engendrant dans ce processus même les catégories à priori, ce mouvement cinétique est libre. Il l’est jusque dans sa relation avec la sphère entière du phénoménal où gisent cachées les conditions pathologiques de la conscience individuelle. Il est visible de plus que la raison de l’homme est une manifestation de l’universelle raison. Étant libre, la volonté est, dans ses relations contingentes, responsable devant la loi de conduite morale, du moment qu’elle connaît cette loi. Sa fonction ou fin première est de connaître ; mais son but suprême est d’agir. De même que le but final de la connaissance est le vrai, disons l’intuition des idées divines dans les choses, de même le but final de la conduite est de vivre dans et par ces idées : car ce n’est que par celles-ci que peut être atteinte la conciliation parfaite du particulier et de l’universel. »

Une courte critique. Cette métaphysique « ancienne et nouvelle », sans discussions historiques, sans études comparatives ni essais de conciliation, ne court-elle pas risque, malgré son mérite, de paraître dépourvue, et comme dépouillée de chair et de vie ? L’auteur n’eût-il pas fait davantage encore pour ses belles conceptions, en commentant souvent ce qu’ont dit avant lui sur la nature de la volonté, sur l’essence de la monade et sur les idées de la raison, les plus profonds des idéalistes, Aristote et Leibniz ?

A. Debon.