Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIII.djvu/218

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
208
revue philosophique

de l’esprit. Vérité instructive, dont on verra tout à l’heure les conséquences.

Cette théorie de la connaissance n’est en effet qu’une introduction nécessaire à la partie métaphysique de l’ouvrage. Il serait intéressant de s’arrêter avec l’auteur sur la distinction des catégories a priori et des catégories a posteriori et de montrer comment on les a souvent confondues ensemble. Mais, pour rendre claire la pensée du livre, il nous faut négliger ces études subtiles et finement exposées, et aller de suite à la dernière partie.

Elle est intitulée : les Idées transcendantales et la solution de l’insoluble. Quelle audace, après Kant, de reprendre ces terribles problèmes et d’oser en soumettre au lecteur une explication plausible ! Ces idées transcendantales ne sont-elles pas la source perpétuellement jaillissante de l’illusion métaphysique ?

Toute opinion préconçue à part, comprenons bien d’abord la double tendance de la raison. C’est d’une part de « déterminer » toujours davantage jusqu’à ce qu’on arrive au percept simple (diathesis of the single), d’autre part de synthétiser toujours davantage, jusqu’à ce qu’on atteigne l’unité absolue de l’ensemble cosmique (synthesis of the whole). Voilà les termini extrêmes de la raison : terminus a quo, terminus ad quem. Mais, en fait, nous n’effectuons jamais qu’une diathèse et une synthèse du conditionné, c’est-à-dire des présentations limitées de notre conscience. Qu’en résulte-t-il ? Une locomotive, du moment où elle est capable d’atteindre son point terminus fixé avec sa pleine charge de vapeur, continue de fouler en avant, quand bien même ses derniers pas devraient la plonger dans le vide. Ainsi notre raison, dans son infatigable activité, s’efforce, suivant la double direction de la diathèse et de la synthèse, à se frayer une trouée à travers les barrières du phénoménal, afin de saisir dans cet au-delà l’absolu infini, l’inconditionné, afin d’embrasser du regard cette contrée inconnue des frontières de laquelle tous les voyageurs ont été contraints de revenir en arrière. Vains efforts, vaines tentatives. » Les concepts purs de la raison sont vides, disent les Kantiens.

Tel n’est pas l’avis de Scotus Novanticus. Les soi-disant « concepts » de la raison sont au contraire de véritables « percepts » dialectiques, ou a priori. Leur nature et leur rôle peuvent s’entendre si l’on consent à observer cette double règle : 1o ne jamais perdre de vue les vraies conditions de la pensée ; 2o réagir contre notre tendance à sensualiser et à phénoménaliser les purs produits de la dialectique. — De là, une division des difficultés de la raison en deux classes.

Première classe de difficultés. — On méconnaît les conditions de la pensée, et l’on s’égare dans les antinomies.

A. D’abord, point de synthèse complète possible du conditionné. Pourquoi ? C’est qu’une pareille synthèse serait une synthèse complète de l’extension ou de la quantité. Or le véritable acte par lequel nous pensons l’extension, ou quelqu’une de ses parties, est un acte qui con-