REVUE DES PÉRIODIQUES ANGLAIS
F. Ellingwood Abbot. Philosophie scientifique : théorie de la connaissance humaine. — On sait que Kant est considéré comme l’auteur d’une révolution en philosophie, pour avoir soutenu qu’il faut considérer les choses comme se conformant à la connaissance et non la connaissance aux choses. Etait-ce une nouvelle méthode philosophique ? Non. Kant ne faisait que compléter, organiser et formuler une doctrine inaugurée au xie siècle par le nominaliste Roscelin, ressuscitée au xive siècle par Guillaume d’Occam. Toute la philosophie contemporaine repose en fait sur une théorie nominaliste des universaux : les écoles transcendantale et associationiste démontrent également la tendance à l’idéalisme, latente dans cette théorie. La « force de l’idéalisme », dont on a souvent parlé à propos de Berkeley, est la « force du nominalisme » ni plus ni moins ; elle conduit logiquement à admettre qu’il n’y a rien en dehors de la conscience individuelle, L’idéalisme doit aboutir au « Solipsime », qui en est la reductio ad absurdum. « Comme la révolution française, la révolution nominaliste ne peu vivre que par la guillotine, en coupant la tête toute perception qui prétend apporter la moindre information extérieure au misérable Solipsiste, renfermé dans la prison de sa conscience. »
Heureusement, ces principes n’ont jamais été admis par la science moderne. Tandis que la philosophie définit la connaissance rien que par le moi et ses propre états, la science la définit comme double : individuelle (connaissance que l’esprit a de ses propres actes plus sa connaissance du cosmos dont il est une partie) générale (somme de toutes les connaissances humaines sur le cosmos, vérifiées et certifiées par les gens compétents). La science ne présente pas ses vérités comme les états de conscience de quelqu’un ; mais elle professe que la connaissance se conforme aux choses, non les choses à la connaissance. L’auteur montre par plusieurs exemples que le point de vue scientifique est complètement objectif. Pour n’en citer qu’un : lorsque M. Thomson nous dit que le poids d’un atome d’hydrogène égale à peu près 109,312 octillionième de gramme, y a-t-il dans la conscience humaine quoi que ce soit d’équivalent à cette quantité ?