Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, X.djvu/51

Cette page n’a pas encore été corrigée
41
h. lachelier. — théorie de la connaissance.

pendule dès lors de la chute des corps. Si les lois de la chute des corps sont vraies, il devient logiquement nécessaire, en vertu du principe de raison, que les phénomènes du pendule se produisent. Les variations correspondantes de la longueur du fil et de la durée de l’oscillation deviennent une conclusion, dont la nécessité, par rapport à ses prémisses, qui sont les lois de la chute des corps, est tout aussi absolue que celle de l’égalité A = C, étant données les deux égalités A = B et B = C. Bien plus, un rapport semblable s’établit même entre les termes de la loi, la longueur du fil et la durée de l’oscillation. En effet, les lois de la chute des corps une fois admises, il suffit de suspendre un corps pesant à un fil de longueur donnée, pour déterminer, avant toute expérience, avec une certitude logique, la durée de l’oscillation.

La nécessité, par ce système, se trouve pour ainsi dire déplacée ; elle ne s’applique plus tant à la liaison des phénomène entre eux qu’à l’enchaînement des séries de phénomènes ou lois entre elles. La loi pour ainsi dire, n’a pas sa nécessité en elle-même, elle la trouve seulement dans un rapport logique avec les lois plus générales dont elle peut être déduite. Il est vrai que, ce rapport une fois établi, il devient possible de transporter la nécessité jusque dans la loi elle-même, considérée indépendamment de toute autre, et de passer désormais de la cause à l’effet, non plus seulement en vertu des lois physiologiques de l’association et de l’habitude, mais par une opération logique de la pensée. L’objet de la science consiste donc à établir, entre toutes les lois que l’expérience nous fait connaître, une coordination et une subordination logique. La science a pour tâche de former des séries parallèles de lois subordonnées. La coordination est soumise à la condition unique d’éviter toute contradiction des lois entre elles. La subordination doit être partout conforme au principe de raison. Aussitôt qu’une loi nouvelle est découverte, la science, après s’être assurée qu’elle ne contredit aucun fait déjà connu de l’expérience, doit chercher les lois plus générales ou les hypothèses auxquelles cette loi peut être logiquement reliée et dont, au besoin même, elle aurait pu être déduite avant toute expérience. Cet enchaînement une fois effectué, la loi nouvelle aura pris dans la science un rang définitif.

La science est encore bien éloignée de cette connexion logique des séries régulières de phénomènes entre elles, qui est la vraie causalité. Il s’écoulera un temps infini avant qu’elle ait réussi à déduire toutes ses lois d’un nombre limité de faits primitifs et axiomatiques de l’expérience. Seules la mécanique proprement dite et la partie mécanique de la physique sont assez avancées pour entreprendre un enchaî-