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ment la queue d’un triton ou la patte d’une grenouille, l’animal devient subitement immobile, stupéfié, et cette stupeur dure quelquefois plusieurs minutes. Ainsi le sommeil est provoqué non par l’absence d’excitations périphériques, mais au contraire par une excitation forte. Il est difficile de trouver une théorie qui soit plus que celle de M. Heubel en désaccord avec les faits.

La théorie de M. Heubel n’est donc pas admissible, et, au lieu de voir dans cette sorte de sommeil des grenouilles la conséquence d’une absence d’excitation, il faut y voir la conséquence d’un excès d’excitation. Il est probable que, sous l’influence des excitations périphériques, les parties du cerveau qui président à l’arrêt des actions réflexes et volontaires, entrent en jeu et paralysent les parties sous-jacentes de la moelle épinière[1].

Telles sont, très rapidement résumées, les recherches faites jusqu’ici sur l’hypnotisme des animaux. Il est à désirer qu’elles soient reprises, car elles donneront certainement des résultats fort intéressants. En tout cas, celles qui ont été faites jusqu’ici nous seront de quelque utilité pour l’explication des causes qui produisent le somnambulisme chez l’homme.


IV. — Des moyens de provoquer le somnambulisme.

Certes l’étude des symptômes et des formes du somnambulisme est encore bien obscure. Elle est très avancée cependant, si l’on compare ce que nous savons des symptômes à ce que nous savons des

  1. Mon intention est de publier ces recherches avec plus de détails et de développer dans un travail spécial les conclusions auxquelles j’ai été amené. Aussi n’insisté-je pas davantage sur le sommeil des grenouilles, et les considérations de psychologie physiologique qui pourraient prendre place ici. Quant aux rares observations de sommeil des animaux produites par les magnétiseurs de profession, elles sont incohérentes, incomplètes, et méritent peu de créance, car on ne peut pas reproduire ces faits toutes les fois qu’on le désire : ce qui entraine une incertitude bien naturelle. Il paraît qu’en Orient les charmeurs de serpents arrivent à des résultats étonnants ; mais il faudrait que ces faits fussent observés scrupuleusement par des naturalistes ou des physiologistes expérimentés, pour qu’ils pussent avoir droit de cité dans la science. En Perse il y a des charmeurs de lièvres (Tour du monde, 1832. II. p. 127).

    Peut-être aussi y a-t-il lieu d’assimiler au magnétisme la fascination exercée sur certains animaux par les reptiles ; l’arrêt du chien de chasse, etc. Est-il permis de faire appel à l’attention des observateurs pour tâcher d’apporter un peu de lumière sur tous ces points. Jusqu’à présent, la question du somnambulisme des animaux n’a été qu’ébauchée. Le mémoire de M. Preyer est à coup sûr ce qu’il y a de plus précis sur le sujet.