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développée qu’il sera commode de consulter, vu la rareté de l’original. Résumons-la en peu de mots. Tandis que les philosophes antérieurs faisaient appel à l’association accidentellement, Hartley l’invoque pour expliquer tous les phénomènes de l’esprit. Il y a pour lui deux sortes d’association, l’une synchrone, l’autre successive : ce double mode de l’association, joint à la théorie des petites vibrations, suffit à rendre compte de toutes nos facultés. Ces petites vibrations, empruntées aux théories optiques de Newton, ont lieu dans le cerveau et sont simultanées aux idées ; les unes et les autres sont susceptibles des mêmes connexions ; les unes et les autres changent quant au degré, quant à l’espèce, quant à la situation et quant à la ligne de direction. Plusieurs des vibrations sont infiniment petites ; plusieurs des idées sont également à peine senties. « L’auteur, dit M. Ferri, pousse si loin le parallélisme entre le minimum ou l’infiniment petit de vibration et de sensation d’un côté, et l’association de l’autre, qu’on ne peut, à son avis, d’une manière absolue fixer de limites à leur dépendance mutuelle. Ceci est le point le plus remarquable et jusqu’ici, à ma connaissance, le moins remarqué de la doctrine de Hartley. Avant Hamilton, il a fait intervenir l’inconscient dans l’exercice des fonctions mentales ; avant Spencer, il s’en est servi pour étendre à sa limite extrême la doctrine de l’association psychologique. » Priestley et Erasme Darwin ne sont que ses continuateurs, c La doctrine psychologique de l’association a donc atteint son apogée avec Hartley dans cette première période… Substituez à sa substance médullaire la substance grise des modernes, à ses vibrationcules les ondes de mouvement moléculaire, à ses sensations en miniature les sensations élémentaires de Spencer ou d’autres de nos contemporains, et vous trouverez que la plus grande partie des concepts qui guident l’école moderne de l’association ont été pressentis par lui. »

Avec Hartley se termine la période de formation et de constitution de l'École associationiste ; dans une seconde période qui va de Reid à James Mill, M. Ferri nous montre le principe se restreignant à la proportion d’un fait ; l’association n’est plus invoquée pour l’explication de la pensée en général, elle est étudiée comme une fonction intéressante, mais secondaire de la vie de l’esprit.

Avant Reid, le premier Écossais de la branche d’Aberdeen, Turnbull, l’avait envisagée de la sorte. M. Ferri n’a vraisemblablement connu Turnbull que d’après Mac Cosh ; nous avons sous les yeux son principal ouvrage : « Principes de philosophie morale, etc. » (Londres, 1740). Le chapitre sur l’association a pour but d’établir que, comme les autres lois de la nature humaine, la loi d’association est bonne, c’est-à-dire utile aux fins de l’homme, et qu’elle concourt à justifier la Providence. En quoi consiste cette loi ? En ce que « nous éprouvons de la peine à séparer les idées qui se sont présentées simultanément à l’esprit ». Turnbull prend l’esprit tout fait et les idées toutes formées ; il ne s agit pas pour lui de savoir si l’association joue un rôle dans la struc-