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Les exemples qui précèdent suffisent pour faire voir l’effet de la concurrence et de la sélection dans l’ordre des sensations. Les lois générales qui s’appliquent aux erreurs de la sensation montrent combien est grande l’influence des conditions que rencontrent les excitations extérieures.

Il résulte de la théorie de la concurrence et de la sélection que : 1° les erreurs doivent souvent être en rapport avec les habitudes d’esprit ou de corps des visionnaires ; 2° les illusions et les hallucinations auront bien plus de chances de se produire quand les impressions extérieures seront ou moins nettes, ou moins vives, ou moins variées. C’est là, en effet, ce que l’expérience vérifie.

La sélection est très visible aussi dans le rêve. L’interprétation donnée des sensations qui frappent le dormeur en est un exemple frappant. Une partie de l’esprit seulement est alors en activité, et l’activité des autres parties ne peut plus intervenir ; de là viennent le réveil d’idées oubliées, réveillées par une faible association, grâce au peu de concurrence que les autres tendances leur font, et le choix qui s’opère parmi les impressions reçues.

Les inductions tirées a priori des lois connues de l’esprit et de l’organisme peuvent donc être considérées comme vérifiées dans le domaine de la sensation.

F. Paulhan.
(A suivre.)