Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/81

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
75
paulhan. — l’erreur et la sélection

mente, les combinaisons et les décompositions chimiques sont facilitées, le mouvement moléculaire est plus grand, et les excitations qui ont pour effet d’amener ces phénomènes sont plus facilement admises. Si nous supposons que chaque fait de conscience a pour corrélatif un phénomène physiologique particulier, nous comprendrons que les excitations détermineront d’autant plus facilement les mouvements qu’elles tendent à déterminer, que ces mouvements ressembleront plus ou s’adapteront mieux aux mouvements existant déjà, c’est-à-dire que l’état de conscience qu’elles tendent à déterminer ressemblera plus à l’état de conscience existant déjà, ou s’accordera mieux avec lui.

La persistance est un commencement d’habitude ; elle a, à un certain degré, les mêmes effets. Une impression qui persistera longtemps finira souvent par vaincre la résistance qu’elle rencontre.

La persistance trop longue d’une impression finit par amener l’insensibilité des organes à l’égard de cette impression. Il arrivera alors que les impressions adverses auront plus de chances pour l’emporter à leur tour et s’imposer pendant quelque temps.

Tous ces faits se vérifient dans les diverses parties de l’activité psycho-physiologique. Que ce soit la sensibilité, l’intelligence, la volonté, l’activité que l’on étudie, on retrouve les mêmes lois, que l’on peut formuler ainsi.

Plusieurs faits extérieurs à l’organisme, ou intérieurs, tendent à déterminer en nous des phénomènes d’ordre psycho-physiologique. Ces causes virtuelles ne peuvent arriver toutes à produire leurs effets ; celles que leur nature propre et les circonstances favorisent l’emportent sur les autres. Ces dernières demeurent sans aucun effet appréciable ou n’ont que des effets moindres.

Les circonstances qui peuvent faire agir efficacement une de ces causes virtuelles sont l’habitude, la persistance, la force ou la violence de l’impression, l’attention. L’insensibilité des organes déterminée par la persistance trop longue d’une excitation fait triompher les excitations contraires.

Toutes les causes virtuelles qui peuvent déterminer des faits psycho-physiologiques, excitations ou tendances internes, sont, au moins en partie, plus ou moins habituelles. Toutes choses égales d’ailleurs, une sensation sera d’autant plus facilement perçue, une idée sera d’autant plus vite comprise, une action d’autant plus aisément déterminée, que les causes de ces phénomènes auront plus souvent agi sur nous. Nous percevons mieux, nous comprenons plus aisément ce qui ressemble à ce que nous connaissons déjà ; nous obéissons plus volontiers aux motifs qui nous guident ordinairement.