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ANALYSESlewes. — The study of psydiology.

des phénomènes. Puisqu’il y a deux aspects des choses, il y aura une double manière de les exprimer scientifiquement. Considérez par exemple la loi de gravitation. C’est incontestablement une loi de l’objet ou de la matière ; elle contraste de la façon la plus vive avec la loi d’association, qui est non moins indubitablement une loi du sujet ou de l’esprit. D’où cette distinction ? C’est que dans le premier cas notre attention est exclusivement portée sur les relations objectives, et alors, négligeant l’aspect subjectif de la connaissance, le savant donne cette loi comme indépendante de l’esprit qui la conçoit. Erreur manifeste. Dans le second cas, c’est l’aspect subjectif qui absorbe notre intérêt ; nous ne pensons qu’aux états de conscience associés, sans songer aux faits externes qu’ils impliquent et aux processus nerveux qui en sont les corrélatifs physiques. Pourtant rien n’empêcherait de regarder la loi de gravitation comme une loi subjective, et la loi d’association comme une loi objective ; il suffirait d’échanger les deux points de vue (§§ 36-38). « Les faits observés et classés sont nécessairement des perceptions de l’observateur, et la loi qui formule ces observations est sans aucun doute une construction idéale qui n’a point de réalité objective. Les deux lois, celle de la gravitation et celle de l’association, sont donc des conceptions symboliques, et ce qu’elles symbolisent, ce sont des états de conscience. Vues à cette lumière, elles sont l’une et l’autre des faits psychologiques ; considérées objectivement, la première est un fait mathématique^ la seconde un fait physiologique. »

De cette vérité générale, nous passons sans effort à l’importante conclusion que voici. Il est une science où, comme nulle part ailleurs, ce double aspect des phénomènes apparaît en pleine clarté ; là, notre intérêt est le même, qu’il s’agisse du côté objectif des faits ou de leur côté subjectif. Cette science, c’est la biologie. La biologie occupe une place de droit parmi les sciences objectives, puisque, maigre le caractère spécifique des phénomènes vitaux, ceux-ci ne sont que des spécialisations des propriétés de la matière et puisqu’ils s’expriment scientifiquement en termes de force. Mais la biologie n’en a pas moins sa place parmi les sciences subjectives, car : 1o  le mécanisme vital a pour ressort d’action la sensibilité, et 2o  l’évolution générale des phénomènes biologiques, du végétal à l’animal, de l’animal à l’homme et à la société, implique les phénomènes de l’esprit. Et à ce sujet on peut, dit Lewes, faire cette remarque curieuse : c’est que les faits de la vie animale et de la vie humaine, bien qu’ils puissent s’exprimer objectivement en termes de force, sont usuellement exprimés par le vulgaire en termes de sensation et de conscience. Aveu instinctif de l’équivalence et de l’inséparabilité des deux aspects des choses (§ 39).

II. Les opinions des contemporains sur la place de la psychologie. — La psychologie n’est donc en définitive qu’une branche de la biologie : telle est l’opinion à laquelle Lewes déclare s’être arrêté, après bien des hésitations. Pour la justifier aussi bien en fait qu’en théorie, il