Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/649

Cette page n’a pas encore été corrigée
643
ANALYSESlewes. — The study of psychology.

de l’ouvrage, sans attacher une importance illusoire aux divisions adoptées par l’auteur.

I. La psychologie comme science biologique. — Avant tout, quel doit être le point de vue de la psychologie scientifique. Jusqu’à présent, trois directions ont été suivies. Les uns se sont bornés à l’analyse introspective des phénomènes, sous leur aspect mental exclusivement : tels Locke, Berkeley, Hume, Condillac, Hartley, James Mill. D’autres n’ont voulu voir et étudier que leur aspect physique et leurs conditions biologiques : qu’on se rappelle Cabanis, Gall, et leurs émules parmi les récents physiologistes. Enfin un troisième groupe de savants (Lotze, Wundt, Bain, Spencer, Taine) a tâché de combiner les études objectives et subjectives, en montrant partout le double aspect des faits. Au milieu des subjectivistes, , des physiologistes et des positivistes, la psychologie se cherche et voudrait s’organiser en corps de doctrine, en système scientifique, au lieu de se morceler en théories individuelles.

Pour cela, que faut-il ? Combiner ces trois modes de recherche et les appliquer non pas à l’esprit et à l’organisme individuels, mais à l’esprit humain comme produit de l’organisme humain dans ses rapports avec le cosmos et avec la société. Mais quelle sera l’âme de cette fusion des méthodes ? Quelle conception générale le chercheur est-il appelé à suivre ? Il est nécessaire, répond Lewes, d’adopter franchement le point de vue biologique, c’est-à-dire de regarder les fonctions mentales comme des fonctions vitales et de réduire la distinction des états de conscience et des états de l’organisme à une simple différence dans le mode d’appréhension. La conception traditionnelle et métaphysique de l’esprit, considéré comme agent séparé de l’organisme, est incompatible avec la science psychologique. L’expérience du passé et les nécessités de la méthode scientifique nous amènent, dit Lewes, à la définition suivante : « La psychologie est l’analyse et la classification des fonctions et des facultés sentantes, révélées à l’observation et à l’induction ; et elle a pour complément la réduction des unes et des autres à leurs conditions d’existence, soit biologiques soit sociologiques. » Le sens, la raison d’être et la portée de celte conception biologique de l’esprit méritent quelque explication.

La critique de la connaissance, heureusement, n’est plus à faire ; il s’agit simplement d’examiner si la classification vulgaire des sciences peut se réclamer de Hume et de Kant. Jusqu’à nos jours, on a distingué deux ordres de sciences absolument séparés l’un de l’autre, disons mieux, opposés : on ne reconnaît rien de commun à ces deux ennemis irréconciliables, ni la logique, ni les moyens d’explication ou de vérification. C’est une sorte de dogme que les Sciences physiques et les Sciences morales, suivant deux routes parallèles, ne se rejoignent que dans un monde transcendant, suprasensible. La théologie l’a crié bien haut, et la métaphysique a fait chorus avec elle. Par bonheur, la physique, depuis deux siècles déjà, a réussi à s’émanciper du joug Ihéologique et métaphysique, et l’on est venu à penser que l’homme lui aussi,