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compayré. — du prétendu scepticisme de hume

beaucoup plus vive de personnages de roman, tels que M. Pickwick ou le colonel Newcome, que de telle personne que je me rappelle avoir vue il y a quelques années[1]. » M. Pillon fait la même remarque : « Demandez aux auteurs d’un poème épique, tel que l’Iliade ou la Jérusalem délivrée, s’ils n’ont pas des combats rapportés dans ce poème une idée plus vive que de batailles réelles rapportées dans une histoire quelconque[2]. » Et, s’il nous est permis de nous citer nous-même, nous avons fait une observation analogue dans notre étude sur la Philosophie de Hume : « La conception du triangle, du cercle, n’est-elle pas beaucoup plus vive pour le géomètre que la conception de César ou de Charlemagne pour un historien ? Et cependant nous croyons que César, que Charlemagne ont existé, tandis que nous prenons le cercle, le triangle pour ce qu’ils sont, c’est-à-dire pour des abstractions et des hypothèses[3]. » La différence du souvenir et de l’image ne doit pas être cherchée dans une qualité intrinsèque qui serait un degré de plus ou de moins dans la force de la représentation : c’est une différence de relation. Le souvenir est lié par des relations indissolubles à d’autres souvenirs ; il est un anneau fixe attaché à d’autres anneaux dans la longue chaîne de la mémoire, et voilà pourquoi le souvenir entraîne la croyance. L’imagination pure au contraire est une conception qui n’a avec les autres idées que des relations lâches, des liens fragiles, qu’il dépend de nous de briser, et c’est pour cela qu’elle laisse notre jugement libre.

Hume a donc déjà commis quelques méprises sur la nature des éléments qu’il reconnaît dans l’esprit ; mais son erreur la plus grave, c’est d’avoir omis un de ces éléments. Dans la carte qu’il dresse de la conscience, il y a tout un territoire oublié, celui des lois natives de l’esprit, des conditions, des formes de la pensée.

Sur ce point, tous les nouveaux critiques de Hume sont d’accord. M. Huxley s’appuie sur Kant et aussi sur M. Herbert Spencer pour établir que les impressions sensibles, les idées de l’expérience, ne sont pas les seuls matériaux de l’esprit, qu’il y a d’autres éléments simples, indécomposables, de la conscience, ce qu’on appelle, selon les écoles, vérités premières, principes a priori, catégories. Seulement l’esprit anglais, avant tout ami de la clarté, ne s’accommode pas des subtiles et parfois obscures analyses de Kant, et voici comment, avec les comparaisons pittoresques qui lui sont familières, M. Huxley apprécie le langage du philosophe allemand : « L’exposition de Kant, dit-il, est d’un style si embarrassé, elle est si étran-

  1. Huxley, Hume, p. 93.
  2. Traité de la nature humaine, Introduction, p. 4.
  3. La Philosophie de Hume, p. 232.