prix du mal, le bien n’arrive pas toujours, et ce bien-là du reste, si nous le possédions complètement, ne nous rendrait pas plus heureux, car il consisterait, arrivé à son plus haut degré, dans le tranquille repos de l’adaptation universelle, dans l’équilibre suprême, dans l’anéantissement de la personnalité.
VI
C’est au point de vue de la psychologie que nous avons considéré jusqu’à présent la loi de concurrence et de sélection. À un point de vue philosophique, on peut se demander quel rapport existe entre la loi de concurrence et les autres grandes généralisations de la philosophie, telles que l’association, la conservation de la force, etc., et quelle influence peut avoir la théorie de la sélection sur la solution des grands problèmes du monde et de l’esprit, les causes finales, la nature et la validité de nos connaissances.
Comparée à la loi d’association, la loi de concurrence est moins abstraite. Elle tient compte des faits que la loi d’association n’embrasse pas. Cette dernière ne s’applique qu’aux résultats de la concurrence, à la sélection effectuée. La concurrence explique l’association psychique, comme la sélection des animaux explique l’adaptation.
Au-dessus de la loi de concurrence, nous avons donc, en passant du moins abstrait au plus abstrait, l’association et la pesanteur, puis la conservation de la force. La conservation de la force est-elle le dernier mot de la philosophie ? On sait que cette loi sert de base au système d’Herbert Spencer. Il serait hors de propos d’examiner ici cette théorie, que compromet en partie la confusion de deux choses distinctes réunies sous le mot de force. La conservation de la force doit s’appliquer seulement aux phénomènes et servir à marquer leurs équivalences, c’est-à-dire la possibilité qu’ils ont de se remplacer. Au-dessus se trouve la constance des lois de la nature. Cette loi peut subsister sans la conservation de la force, car on pourrait supposer un monde où l’équivalence des phénomènes varierait. Il suffirait que les variations se fissent d’une manière régulière pour que les lois fussent constantes. Plus abstraite encore est la loi du déterminisme des phénomènes. Enfin, si l’on supprime par abstraction la détermination d’un fait par ses antécédents, il ne reste plus que la succession et la coexistence des phénomènes, les faits, l’espace et le temps. Ecarte-t-on encore ces deux conditions, une seule chose reste, la loi de phénoménalité, qui s’exprime par un