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hartmann. — la philosophie religieuse

et extraordinaire. Si l’on n’admet comme révélation proprement dite que celle qui est faite intérieurement ou directement, il ne peut y avoir dans cette dernière que des différences de degré. Pfleiderer fait aussi ressortir ce fait ; cependant il semble croire que la distinction dont nous parlons plus haut, faite évidemment en faveur des fondateurs de religions, peut avoir une certaine valeur si on la ramène à la distinction entre la révélation naturelle et surnaturelle, en tant que, chez ceux qui ont été particulièrement favorisés sous le rapport des révélations, l’inspiration divine a un tel degré de force que la personnalité humaine se trouve placée à l’arrière-plan. Mais, d’après les hypothèses de Pfleiderer lui-même, cette opinion n’est pas soutenable, car l’acte religieux de la révélation n’est pas un produit de deux facteurs, de l’humain et du divin, avec des degrés divers d’intensité ; mais, partout où il a lieu, il est à la fois entièrement divin et entièrement humain, de sorte qu’on peut seulement chercher une différence dans le degré de son développement à l’état de conscience.

Pfleiderer montre lui-même l’inanité de la distinction que l’on fait ordinairement entre la révélation surnaturelle, représentée par le supra-naturalisme, et la révélation naturelle, représentée par le naturalisme. Celui-ci a raison de nier une révélation qui dépasse la compréhension naturelle de l’intelligence humaine ; celui-là a raison de dédaigner une révélation dont l’unique source est la connaissance humaine naturelle prise dans son sens restreint. En réalité, l’acte religieux est purement naturel, si l’on comprend dans la nature humaine l’immanence de l’absolu ; mais il est à la fois surnaturel et naturel, si l’on emploie le mot nature en opposition avec l’intelligence supérieure de l’homme. D’après sa forme, l’acte religieux est naturel dans tous les sens de ce mot, en tant qu’il est lié lui-même, ainsi que son contenu, aux lois psychologiques de la représentation et de la motivation ; il est surnaturel par son essence et par son but, en tant qu’d repose sur le fondement transcendantal de l’esprit individuel et qu’il se rapporte lui-même d’une manière transcendantale à ce fondement transcendantal. C’est précisément parce que l’esprit humain repose sur une base transcendantale qu’il est en état de s’élever par des moyens naturels au-dessus de son mode d’existence purement naturel ou au-dessus de sa nature purement humaine, afin de réaliser sa nature idéale divine, car c’est uniquement de celte façon qu’il accomplit son vrai but ou sa vraie nature. Dans ce sens, la révélation n’est pas une inspiration venant de l’extérieur, mais un résultat de l’activité propre de l’esprit humain d’après ses lois immuables ; cependant l’esprit humain n’at-