sanne fait preuve à l’égard de la tradition d’une indépendance très louable et très sincère.
Malheureusement M. Astié, dans le cours de son alerte exposition, oublie un peu que nous ne sommes pas aussi au courant des affaires de l’Église libre du canton de Vaud que les auditeurs qui ont eu les prémices de son étude. Il en résulte que mainte allusion nous échappe et que nous sommes réduits à deviner ce que nous aurions eu intérêt à voir clairement. Ainsi il eût été nécessaire de nous donner le texte de cette profession de foi qui a été la base de l’Église vaudoise et qui fait partie de son acte de constitution ; nous aurions pu juger par nous-même si M. Astié ne se fait pas quelque illusion en affirmant qu’elle ne contient que des affirmations « religieuses » et laisse au développement théologique toute latitude. Toutefois nous sommes assez au courant de l’usage qui est fait généralement de cette sorte de documents pour ne pas attacher une trop grande importance à leurs termes exprès. N’avons-nous pas vu la fraction orthodoxe de l’Église réformée de France prendre comme palladium et employer comme critérium de l’orthodoxie dans une tentative d’exclusion des éléments indépendants qui dure depuis quinze ans, un document antique, le Symbole dit des Apôtres, dont elle n’admet plusieurs assertions que sous bénéfice d’inventaire, ou, pour parler net, dont elle ne saurait admettre à aucun titre trois ou quatre articles, soit en tant que légendaires, soit comme ayant un sens originel, inconciliable avec le dogme protestant ? Ce que j’en dis s’applique : 1o à la descente de Jésus aux enfers dans l’intervalle qui a séparé la crucifixion de la résurrection ; 2o à la « sainte Église catholique » ou universelle ; 3o à la communion des saints ; 4o à la résurrection « de la chair » ; 5o à la rémission des péchés, sans parler du jugement à exercer sur les vivants et les morts, auquel fort peu continuent de croire dans un sens matériel. Cet exemple mémorable me rend, je l’avoue, fort sceptique à l’égard des documents analogues contemporains. Ce qui m’intéresse davantage, c’est la liberté d’interprétation dont on jouit à leur égard, et, pour le cas présent, qu’on puisse légitimement entendre, comme fait notre auteur, celle qui nous occupe.
Assurément, à Lausanne, nous sommes loin de ce ridicule procès d’hérésie intenté l’autre jour en Écosse à un professeur de théologie distingué, sous le prétexte qu’il avait émis l’opinion que le Deutéronome n’était pas l’œuvre de Moïse. Toutefois, tandis que M. Astié affirme qu’on ne doit voir dans la confession de foi vaudoise qu’une affirmation religieuse, d’autres, il nous l’apprend, prétendent y trouver autre chose. C’est contre ceux-là qu’il se défend vaillamment, mêlant d’ailleurs l’attaque à la défense : « Nos fondateurs ont placé à la base de cette Église une conception de l’Évangile, claire, positive, mais aussi large, populaire. Sans sacrifier en rien les droits imprescriptibles de la foi, elle respecte ceux de la science ; nous sommes pleinement autorisés à examiner toutes les prétentions de celle-ci, avec le calme d’un fidèle se disant qu’il ne saurait y avoir de vérité contre la vérité…