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nent qui s’accommodent le mieux des traces laissées par les décharges nerveuses précédentes, c’est-à-dire qui ressemblent le plus aux excitations précédentes. On voit combien ce qui arrive ici est analogue à ce qui se passe pour la sensation et l’intelligence. L’ivrognerie produit des effets de ce genre. On comprend combien l’habitude est souvent difficile à vaincre ; il faut, pour arrêter l’acte, une excitation beaucoup plus forte que celle qui tend à le faire accomplir, ou bien il faut empêcher absolument la production de toute excitation capable de le faire commettre. Souvent les efforts sont vains, la volonté ne peut lutter.

Parfois c’est un penchant dû à des causes inconnues qui porte au mal et qui détermine les actes de ceux qu’il possède malgré tous les efforts qu’ils peuvent faire pour se corriger. De tous les sentiments, do toutes les causes qui peuvent tendre à les faire agir, celle-là triomphe qui s’accorde avec l’habitude.

Force des impressions. — La violence de la cause qui tend à déterminer l’acte peut la faire triompher, que cette violence soit due à une excitation extérieure ou à un état morbide des centres nerveux. Certains malades atteints de manie raisonnante sont obligés souvent de lutter pour ne pas se laisser entraîner à prononcer des phrases, à émettre des idées dont ils reconnaissent la fausseté.

Une forte excitation peut déterminer un meurtre ou un suicide. Maudsley raconte l’histoire d’une femme qui, rêvant que le feu est à sa maison, se lève et, dans le premier trouble du réveil, jette pour le sauver son plus jeune fils par la fenêtre. Les crimes commis par des épileptiques doivent, d’après le même auteur, être souvent attribués à des hallucinations effrayantes[1].

L’imitation morbide est un fait assez fréquent, Esquirol, Luys, Despine[2] en citent de nombreux exemples. La cause de l’imitation se trouve souvent dans ce fait que toute représentation d’un acte est une tendance à commettre cet acte. L’idée d’un acte, qu’elle soit donnée par le souvenir, la lecture, l’audition, etc., tend plus ou moins fortement à nous le faire accomplir ; la vue d’un acte, étant une représentation plus forte, aura plus d’efficacité encore. Lorsque la tendance sera favorisée par les circonstances, elle pourra l’emporter et déterminer un crime.

Dans la monomanie homicide, on trouve tous les degrés de force que peut acquérir l’impulsion : quelquefois l’excitation est faible, et les bons instincts triomphent ; quelquefois le malade peut établir

  1. Maudsley, Le crime et la folie.
  2. La contagion morale. De l’imitation considérée au point de vue des différents principes qui la déterminent.