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ANALYSESsiebeck. — Ueber das Bewusstsein.

ressante que nous rencontrons dans un récent article de l’American naturalist (avril 1879) sous la signature de M. Xenos Clarck. On sait qu’un son musical proprement dit n’est jamais simple, mais complexe ; il se compose d’un son fondamental auquel se superposent plusieurs sons harmoniques à des intervalles de plus en plus rapprochés ; les premiers intervalles, et les plus nettement perceptibles, sont l’octave, la quinte, la quarte et la tierce majeure. Chacun des sons simples dont l’ensemble constitue le son total, fait vibrer un groupe particulier de filets du nerf auditif. Ce fait, souvent répété, finit par engendrer une sorte de prédisposition organique, de courant nerveux qui se fortifie par l’hérédité. Qu’une cause quelconque mette en mouvement un des groupes dont il vient d’être question : les autres groupes tendront également à entrer en vibration. De même, si un animal chanteur, las de répéter toujours la même note, veut en varier l’altitude ; il choisira naturellement un des sons harmoniques du premier. Ainsi l’origine dernière de la loi mélodique chez les êtres organisés n’est autre que l’harmonie simultanée réalisée dans les sons de la nature inorganique. Cette doctrine trouve une confirmation éclatante dans l’analyse à laquelle plusieurs auteurs ont soumis le chant de nos passereaux ordinaires : les intervalles employés par ces oiseaux sont, en grande majorité, ceux-là même sur lesquels est fondée la mélodie humaine : l’octave, la quinte, la quarte et la tierce majeure[1].

Si plusieurs des lois de l’harmonie moderne ne rentrent pas dans les principes généraux qu’établit la physiologie, il faut en conclure qu’aux dispositions naturelles de l’oreille se sont superposées dans la suite des temps des habitudes musicales devenues héréditaires, qui forment comme une seconde nature aussi exigeante que la première. Il faut encore faire la part des causes subalternes, fortuites. Les différences du système musical des divers peuples proviennent presque toutes de quelques variétés minimes dans le diapason des voix et le timbre des instruments ; l’exemple du piano montre bien de quelle importance ont été dans l’évolution du sens musical, les raisons de simple commodité : notre « tempérament » eût choqué l’oreille d’Aristoxène[2].

L’auteur, après avoir expliqué les conditions élémentaires du beau musical, en étudie sommairement les effets, marque le rapport qui existe entre certaines dispositions de l’âme et l’expression musicale

  1. Parmi les autorités mentionnées par M. Clarck, manque le nom de Beethowen qui a reproduit à la fin de l’Andante de la Symphonie pastorale le chant du rossignol, du coucou et de la caille. Les mélodies qu’il leur prête diffèrent notablement de celles qu’on trouve chez l’auteur américain. Il serait à désirer que de nouvelles expériences permissent de fixer avec plus de précision le chant de ces oiseaux ; dans ces recherches le phonographe pourrait être d’un grand secours.
  2. Il est incroyable combien la finesse de l’ouïe s’est émoussée depuis les Grecs. Cette décadence est déjà sensible dans les derniers temps de l’antiquité. Aristoxène déplore le discrédit où est tombé le genre enharmonique qui supposait une perception très nette des quarts de ton.