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Tout nous conduit à entreprendre l’analyse de l’idée de force en général. C’est là la grande conception qui, dès le commencement du XVIIe siècle, se dégageant de la notion rudimentaire de cause, et se développant sans cesse, nous a donné le moyen d’expliquer les modifications de mouvement éprouvées par les corps et enseigné la manière d’envisager tous les phénomènes physiques. C’est d’elle qu’est née la science moderne, c’est elle qui a changé la face du globe, elle qui, en dehors des applications spéciales, a joué un rôle prépondérant dans la direction de la pensée moderne, et reculé les limites du développement social ; et elle mérite donc qu’on se donne quelque peine pour la bien saisir. Conformément à notre règle, il faut commencer par se demander quelle utilité immédiate il y a pour nous à méditer sur la force. La réponse est qu’ainsi nous essayons d’expliquer les modifications du mouvement. Si les corps étaient abandonnés à eux-mêmes sans qu’aucune force intervint, tout mouvement se continuerait sans changement de vitesse ni de direction. En outre, les changements qui se produisent ne sont jamais brusques. Si la direction change, c’est toujours suivant une courbe sans angles ; si la rapidité varie, c’est par degrés. Ces changements graduels, qui se produisent sans cesse, sont conçus par les géomètres comme les résultantes formées suivant les lois du parallélogramme des forces. Si le lecteur n’est pas encore familier avec ce dont je parle, il trouvera du profit, je l’espère, à suivre les quelques explications que je vais donner.

Un trajet est une ligne dont on distingue le commencement et la fin. Deux trajets sont dits équivalents quand, partant du même point, ils aboutissent au même point. Ainsi, les deux trajets (fig. 3) ABCDE, AFGHE sont équivalents. Des trajets qui ne commencent pas au même point sont considérés comme équivalents, lorsque déplaçant l’un quelconque d’entre eux sans le tourner, mais en le maintenant toujours parallèle à sa position primitive, son point de départ coïncide avec celui de l’autre trajet et que les points d’arrivée coïncident également. Les trajets sont dits ajoutés géométriquement quand l’un commence où l’autre finit. Ainsi, le trajet AE est considéré comme la somme de AB + BC + CD + DE.