d’exister. Mais cette part de vérité est recouverte, suivant lui, d’une couche d’erreur qui l’altère, parce que nous avons mal défini cette activité, et parce que nous avons méconnu l’activité qui est le propre de l’âme et de la vie. Il faut que cette couche d’erreur soit bien épaisse, puisque nous n’aurions rien moins qu’absorbé, sans nous en douter, l’âme et la vie au sein des forces physiques et chimiques.
Il rappelle toutes les oppositions, qu’il a déjà signalées, entre les êtres vivants et le monde physique, entre la cause vivante et la cause physique, pour en conclure la condamnation de toute doctrine enseignant que l’âme est une force, que l’âme a une énergie motrice qui constitue la vie et met en mouvement toutes les fonctions organiques. Si aujourd’hui nous l’en croyons, il n’y aurait pas de notion plus étrangère à la vie et à l’âme que celle de force ou d’énergie motrice. La force, selon notre honorable adversaire, dans les sciences physiques, c’est le mouvement, et rien de plus, auquel tout se ramène par simple transformation. Si l’âme est une force, comme nous le disons, elle n’est donc aussi que mouvement, elle perd son individualité, elle s’absorbe dans la causalité universelle.
La force n’est-elle en effet que le mouvement ? comme le dit M. Chauffard, et sommes-nous conduits à toutes ces redoutables conséquences que les plus profonds philosophes spiritualistes, que Platon avec son αὐτὸ ἕαυτο ϰινοῦν, pas plus que Leibniz avec sa monade centrale, avec sa célèbre formule de l’âme : Vis sui motrix, vis sui conscia, ou Maine de Biran avec sa définition du sens intime par le sentiment immanent de l’effort, n’avaient soupçonnées ? Comment M. Chauffard, dans cette réaction si inattendue contre la notion de force appliquée à l’âme et à la vie, ne s’aperçoit-il pas qu’il confond deux choses bien différentes, à savoir la cause et l’effet ? La force n’est pas, comme il le dit, le mouvement, mais la cause du mouvement, ce qui n’est pas la même chose. Si la force n’était que le mouvement lui-même, l’âme identifiée avec la force ne serait pas en effet autre chose que du mouvement, et elle se confondrait avec le mouvement universel, avec la causalité physique. Mais une force, tout en ayant le mouvement pour attribut essentiel, peut avoir en outre des attributs particuliers qui la distinguent d’autres forces de la nature et qui ne permettent pas de la confondre avec la pure causalité physique. Si toute force produit du mouvement, si toute force est motrice, sinon elle ne serait pas une force, ce n’est pas à dire qu’elle ne produise pas du mouvement dans des conditions déterminées et pour un certain but, ni qu’elle ne possède pas certains attributs propres, comme, par exemple, la spontanéité et la conscience. De ce qu’elle est vis motrix, il ne suit pas qu’elle ne soit pas vis sui motrix, vis su conscia, vis sui compos. M. Chauffard veut bien nous accorder que le mouvement entre comme condition nécessaire dans tous les actes vitaux, ce qui est singulièrement en faveur, à ce qu’il semble, de ceux qui placent la cause de la vie dans l’énergie motrice de l’âme ; mais le mouvement n’en est, suivant lui, que la condition nécessaire : il n’est