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ANALYSES ET COMPTES-RENDUS



Dr H. Steinthal. — Der Ursprung der Sprache im zusammenhange mit den letzten fragen alles Wissens. L’Origine du langage dans ses rapports avec les dernières questions de toute science. — 3e édit., revue et augmentée., 1 vol. in-8o, 374 pages. Harrwitz et Gossmann. Berlin, 1877[1].

On savait, il y a une vingtaine d’années, que le langage est un vaste phénomène naturel soumis à des lois définies, susceptible d’être ramené à des éléments dits primitifs, irréductibles : les racines. Avec Jacob Grimm, Bopp et Guillaume de Humboldt, la science du langage semblait avoir atteint, dans ses investigations régressives, les limites de l’exploration scientifique ; il ne restait qu’à remuer en tous sens ce nouveau champ de recherches, à mieux établir les classifications des langues, à préciser les lois de leurs changements, en un mot à organiser intérieurement cette science, désormais circonscrite. Une grande conception philosophique, l’idée de l’évolution, et une doctrine zoologique féconde en résultats, le transformisme, ont en quelques années élargi, régénéré et coordonné au reste des sciences l’œuvre philologique d’un demi-siècle. À l’heure actuelle, en Allemagne, en Angleterre, en France et en Italie, on n’a plus pour unique souci de dégager, par l’analyse de faits directement observables, les éléments constitutifs de chaque espèce de langues ; ce sont les couches profondes du langage qu’on a entrepris d’amener au jour ; c’est le « langage au maillot » de l’humanité naissante et bégayante qu’on veut deviner ; la question des origines du langage s’impose à l’histoire primitive, à la zoologie, à la physiologie, à la psychologie ethnologique. « La conception génétique de la vie du langage, suivant la remarque de Curtius, est précisément ce qui distingue la linguistique nouvelle de l’ancienne[2]. » Au milieu des nombreux travaux

  1. 1re éd., 1851 ; 2e éd., 1858. — Le Dr H. Steinthal dirige depuis 1859 avec Lazarus, son collègue à l’Université de Berlin, la revue connue sous le nom de Zeitschrift für Völkerpsychologie und Sprachwissenschaft. Outre la présente publication, ses plus importants ouvrages sont : Geschichte der Sprachwissenschaft bei den Griechen und Römern (1863), Charakteristik der hauptsœchlichsten Typen des Sprachbaues, Abriss der Sprachwissenschaft (1871), et divers articles de philologie contenus dans le recueil cité plus haut.
  2. La Chronologie dans les langues indo-germaniques (voy. Bibl. de l’École des hautes études, 1er fascicule, 1869 ; Cf. ibid., la Stratification du langage, par M. Müller).