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τὰ φυσικὰ, que dans le sens vulgaire. La métaphysique de notre auteur peut et doit conduire à une « branche constructive » (constructive Branch) de la philosophie ; mais, en elle-même, elle se ramène à une analyse, la plus profonde possible, des données de la conscience, sans aucune tentative de fournir l’explication dernière de ces données, de se changer en l’ontologie, cette science de l’être à laquelle rien ne saurait être caché. Elle est plutôt une méthode de philosopher qu’une philosophie, et une méthode telle que l’on doive, au bout du compte, être aussi bien éclairé sur l’ignorance imposée à la nature humaine que sur la science où elle peut atteindre.

« Le principe que je crois avoir établi au-dessus de toute contestation possible est celui de la réflexion. Que d’autres parties du système soient attaquées et renversées, celle-là doit subsister. Ce n’est pas autre chose que le Cogito ergo sum de Descartes, analysé et appliqué. Par là, ma doctrine est une métaphysique et se distingue d’une Erkenntnisstheorie ou logique de la connaissance, cette fille de la Critique de Kant qui conduit à la métaphysique. La réflexion fonde une métaphysique, parce qu’elle est le moment de distinguer l’aspect subjectif et l’aspect objectif des phénomènes et nous donne ainsi la notion à la fois de l’existence et de la connaissance, et cela dans le sens le plus large du mot existence, si bien que nous ne pouvons parler ou même former la notion de quoi que ce soit au-delà… »

La réflexion est donc le point cardinal du système. Les vieilles questions sur le principe et la source de l’existence, les problèmes de l’ontologie en un mot, si la philosophie a seulement pour objet l’analyse des données de la conscience sous leur double aspect, subjectif et objectif, restent insolubles tant qu’ils gardent leur caractère ontologique ou absolu. Il faut les transformer pour concevoir même la possibilité d’une solution, et c’est déjà un important résultat que de montrer qu’ils sont insolubles sans cette transformation. Leur solution, sous une forme nouvelle, appartiendra à cette branche constructive dont nous avons parlé et qui n’est déjà plus la métaphysique, c’est-à-dire la philosophie analytique. Celle-ci n’a pas à s’occuper de ces questions, elle en rend l’examen possible et prépare l’étude de ces problèmes qui tourmentent l’humanité : D’où vient l’homme ? Où va-t-il ? Quel est le sens de cette scène du monde qui se déroule sous nos yeux ? « Il faut connaître le monde invisible, dit M. Hodgson, pour découvrir un ou plusieurs principes qui font notre monde visible ce qu’il est. » Mais ce monde invisible est hors des atteintes de la métaphysique.

Ces indications préliminaires suffisent pour montrer le caractère de l’œuvre dont nous avons à nous occuper. La doctrine exposée