Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VI.djvu/430

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
420
revue philosophique

moi est la réalité la plus certaine que nous connaissions, et nous pouvons attribuer sans crainte la même certitude à toutes les connaissances où le subjectif et l’objectif coïncideront de la même façon. Cette a théorie de la coïncidence », simple paraphrase du Cogito ergo sum, est proclamée par l’auteur une grande nouveauté et exposée dans des termes aussi ambitieux qu’énigmatiques.

2° Le moi se reconnaît comme un au milieu de la multiplicité des impressions : de là l’idée de l’espace. Il se reconnaît comme identique au milieu de leur mobilité et de leurs fluctuations : de là l’idée du temps. Et remarquons que précisément ces deux faits, multiplicité et variabilité des impressions, qui engendrent les concepts de l’espace et du temps, servent, une fois qu’ils sont acquis, à leur mesure. Si l’espace et le temps sont les formes essentielles de la conscience du moi, ils sont, comme le moi lui-même, et aussi longtemps qu’on ne les applique qu’à lui, vrais objectivement et subjectivement. « Ces formes, après n’avoir eu d’abord pour contenu que nos impressions psychiques, s’appliquent au moyen des actes volontaires aux mouvements des différents membres, puis aux membres mus eux-mêmes, à la connaissance réelle desquels s’étend l’évidence qui accompagne la conscience » (p. 143).

3° Le moi se détermine par l’espace et le temps actuels qu’il occupe ; qu’il change de lieu et de moment : voilà un nouveau moi qui s’oppose au moi précédent, encore présent au souvenir. Ce moi précédent est déjà un objet extérieur virtuel ; mesurons à l’aide de nos sens ses relations de temps et d’espace : l’objet virtuel devient actuel et réel. Ainsi les objets extérieurs participent d’abord pour nous de la nature du moi : enfants, nous leur attribuons une âme, une volonté, des passions, des défauts ; hommes, nous continuons à les régir par les principes d’identité et d’unité qui nous régissent nous-mêmes. Telle est la théorie de la « projection », déjà exposée dans le premier volume. L’auteur en conclut que nous connaissons exactement les choses dans leur grandeur, leur position et leur durée, et que, pour leurs qualités dites secondaires, nous en avons une notion sinon adéquate, du moins fidèle.

IV. Dans le dernier chapitre de son ouvrage, intitulé l’Organique de la pensée, M. Horwicz, revenant sur ses pas, cherche à distinguer nettement la pensée des modes inférieurs de l’activité psychique dont elle tire son origine. Nous ne le suivrons pas dans les détails de cet examen, rendu nécessaire par la confusion des analyses précédentes ; d’ailleurs la récapitulation suivante en énonce les principaux résultats : « La pensée s’est montrée à nous vis-à-vis de la sensation comme liberté, autonomie (apparente ou réelle), vis-à-vis du souvenir et de la conscience comme activité supérieure, vis-à-vis de la multiplicité des sensations, des souvenirs, etc., comme unité. Simple réaction sensible au début, la pensée se transforme d’abord en connaissance de nos propres inclinations et des moyens de les satisfaire (souve-