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LA LOGIQUE DU HASARD

D’APRÈS M. JOHN VENN[1]


(FIN)

III


Jusqu’ici, nous avons uniquement considéré des faits. Ces faits, au lieu de les étudier séparément, nous les avons réunis dans des groupes ou séries de plus en plus étendues. Nous avons reconnu que, considérés de cette manière, ces faits sont soumis à des lois d’un caractère particulier. Ces lois consistent en ce que, dans un certain groupe, le nombre des faits qui présentent un certain caractère est au nombre total des faits du groupe dans un rapport fixe et déterminé. Au reste, nos conclusions ont eu le même caractère de certitude qu’ont toutes les conclusions rigoureuses d’investigations scientifiques. Si j’observe deux joueurs jouant à pile ou face, je suis certain que chacun gagnera la moitié environ du nombre total des parties. Si je considère 50 000 enfants nés en France dans l’année qui vient de s’écouler, je suis certain que, les circonstances restant ce qu’elles sont actuellement, dans un an tant à peu près seront morts ; tant dans 2 ans ; tant dans 10 ans ; tant dans 50 ans, et que dans 200 ans pas un ne survivra. Encore une fois ce sont là des faits et des lois sur lesquels il est permis de fonder des inférences parfaitement rigoureuses. Mais n’est-il pas permis de considérer ces mêmes lois, d’étudier ces mêmes questions à un autre point de vue ? Ne pouvons-nous pas cesser d’étudier ces faits eux-mêmes pour étudier les opinions que nous nous formons sur ces faits. Pour parler un langage familier à la logique anglaise, après nous être placés au point de vue de la logique matérielle, ne pouvons-nous pas, ne devons-nous pas nous placer au point de vue de la logique formelle ?

On a depuis longtemps distingué deux sortes de probabilités : la probabilité objective et la probabilité subjective. C’est une distinction

  1. Voir le numéro précédent de la Revue.