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analyses. — lilienfeld. Die Socialwissenchaft.

Telle est la thèse qu’il s’est proposé de soutenir et de démontrer, avec l’espoir de trouver dans la comparaison de la vie sociale et du développement des forces naturelles le point de départ d’une conciliation du spiritualisme et du matérialisme. On pourrait rappeler à M. Lilienfeld que cette même thèse qu’il va soutenir et démontrer est celle de M. H. Spencer dans sa Statique sociale, dans ses Essais, dans son Introduction à la science sociale ; on pourrait dire surtout que son attitude vis-à-vis du matérialisme et du spiritualisme résume sur la question l’état psychologique de la plupart des savants. Mais il serait trop commode d’étendre ces remarques générales ; les citations précédentes suffisent pour prouver que dans son ensemble le présent ouvrage est dénué de toute portée originale ; elles invitent assez à passer aux détails.

1er volume. —Si le titre ne l’indiquait, on ne soupçonnerait guère par les premières pages du livre que ce volume soit destiné à démontrer la réalité de l’organisme social, non pas que la question ne soit posée (elle est posée deux fois), mais parce qu’elle apparaît pour la première fois au chapitre IV, noyée dans des développements assez disparates. De plus, l’ordre suivi dans l’agencement des matières est sans logique apparente : les mêmes questions font l’objet des chapitres II et XXXI, des chapitres V, XXVIII et XXX. Le lecteur ne s’étonnera donc ni de la diversité des matières accessoires traitées avant la question principale, ni de la diversité des chapitres rapprochés dans les citations.

Le premier, intitulé : les Questions sociales, débute par un acte de foi dans la généralité du principe de la conservation de la force.

Cette généralisation admise, l’auteur cherche à caractériser révolution du mouvement social ; il remarque avec justesse que, chez les anciens, la législation, la science du droit, l’économie politique sont des arts dépendants des questions sociologiques. Il résume en quelques lignes les différences souvent remarquées entre les conceptions politiques des Romains et les idées sociales des Grecs. Le moyen âge, pour lui, « représente la période du dogmatisme et de la philosophie spéculative non-seulement dans les sphères religieuses, mais aussi sous le rapport de l’investigation naturelle et des questions sociales. » L’époque actuelle est définie dans ces lignes : « Les questions du rapport du travail au capital, la question du travailleur et du prolétariat, les questions de nationalité, toutes ces questions menaçant l’avenir d’ébranlements orageux représentent la note fondamentale du mouvement social présent. »

Ces généralités ne manquent pas d’ampleur ; mais, comme toutes les généralités trop arrêtées, elles renferment un peu de vérité et beaucoup d’erreur. Ainsi la Chine a été troublée au moins autant que l’Europe contemporaine par le socialisme, par exemple, au II siècle de notre ère, à la fin de la dynastie des Han, au xie siècle, sous les Song ; et M. de Carné a constaté l’existence très-ancienne à Singapour de sociétés secrètes