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Convaincu de la justesse absolue de cette argumentation, j'étais obligé, dans ma réponse, de circonscrire la polémique autour de mes formules et d'abandonner celles de Fechner. Voici ce que j'écri- vais : « Supposons que l'on construise une échelle de teintes diffé- rentes allant du sombre au clair, et choisies de façon que les con- trastes sensibles entre deux teintes voisines soient tous égaux, en plaçant le à une teinte quelconque, les chiffres positifs d'un côté, les chiffres négatifs de l'autre, j'aurais certainement une échelle qui mesurerait la sensation de lumière ou d'obscurité à la façon dont un thermomètre plus ou moins exact mesure la chaleur. Sans doute cette échelle serait défectueuse en ce sens que la mesure ne parti- rait pas du zéro absolu ; mais ce défaut lui serait commun avec nos thermomètres. Il vaudrait mieux, sans contredit, avoir une échelle comme le baromètre qui mesure la pression de manière que le zéro de l'échelle corresponde au zéro de pression. Ce desideratum, j'ai essayé de l'obtenir. Il suffit, en effet, pour cela de faire commencer les teintes sombres à une lumière égale à 0, c'est-à-dire à l'obscu- rité complète, et de prendre pour unité de mesure le contraste entre deux teintes quelconques voisines ou éloignées. Si maintenant on me demande où se place la sensation 0, elle se place à ce moment où l'organe n'est soumis qu'à sa propre excitation physiologique nor- male. » Puis je montrais comment dès lors le problème devait se mettre en équation l .

On le voit, la sensation est, dans ce procédé, mesurée par une unité de sensation. Qu'elle le soit bien ou mal, peu importe pour le moment; mais le principe est sauf. Dans Fechner, la sensation est mesurée par l'excitation, et il s'en explique même très-clairement (page 1) dans un passage déjà cité. « S'il est, dit-il, impossible d'ob- tenir la mesure de la sensation par la superposition intérieure de sensations, de la même manière qu'on mesure extérieurement un morceau d'étoffe au moyen du mètre, cependant on peut la faire reposer sur le rapport de dépendance qui existe entre la force de l'excitation et celle de la sensation provoquée par elle et, de cette façon, mesurer la sensation intérieure par un mètre extérieur. » C'est là une pure illusion. La sensation doit être mesurée par son unité naturelle qui ne peut être qu'une sensation ; l'excitation à son tour doit l'être par une unité d'excitation. De cette manière la sensation

1. Voici, pour les mathématiciens, la suite de mes formules : d S =z k J* E ^ .

C étant une constante représentant l'excitation interne naturellement propre à l'organe. Intégrant il vient : S = k log (C-j-E) + g ; en posant que pour E = 0, on a S = 0, on détermine la constante q, et l'on a définitivement : S = k log — ç — '- Plus tard je donnerai un autre mode de déduction.

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