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mettre à deux genoux à celle de se mettre sur un genou, posture moins abjecte et se rapprochant davantage de l’attitude droite. Il nous suffira de noter la transition de la pose sur un genou à l’inclinaison du genou. Nous voyons bien par l’exemple des Japonais que cette dernière forme de salutation est une abréviation. « En se rencontrant, ils témoignent leur respect en pliant le genou, et, quand ils veulent rendre à une personne un hommage extraordinaire, ils se mettent à genoux et s’inclinent jusqu’à terre. Mais cela n’a jamais lieu dans les rues, où ils font seulement un mouvement comme s’ils allaient s’agenouiller. Quand ils saluent une personne de haut rang, ils plient le genou de façon à toucher la terre avec leurs doigts. »

Nous voyons la même chose aussi bien ou mieux en Chine ; parmi les gradations spécifiées de la salutation, la troisième est définie : plier le genou ; la quatrième : s’agenouiller réellement. Sans accumuler des preuves, il est manifeste que chez nous les saluts des hommes et les révérences faites par les dames jusque dans ces derniers temps (en tirant le pied droit en arrière) sont les uns et les autres des restes tendant à disparaître de l’ancienne coutume de plier un genou.

Il reste seulement l’inclinaison accessoire du corps, qui est d’une part le premier mouvement que l’on fait en se prosternant complètement à terre, et d’autre part le dernier mouvement qui survit à mesure que la prosternation s’abrège graduellement. En différents pays, nous trouvons des traces de cette transition. « Chez les Soosoos, même les femmes d’un homme puissant, quand elles lui parlent, inclinent le corps et placent une main sur chaque genou ; elles font le même salut quand elles passent devant lui. À Samoa, « quand on passe à travers une chambre où un chef est assis, il est irrespectueux de marcher droit ; il faut incliner le corps en passant. Au sujet des anciens Mexicains, qui, pendant les assemblées, s’accroupissaient devant leurs chefs, nous lisons : « Quand ils se retiraient, ils baissaient la tète. » Dans le rituel des cérémonies chinoises cité plus haut, nous trouvons que la deuxième salutation, moins humble que celle de plier le genou, consiste à s’incliner en joignant les mains. En présence de ces faits et nous rappelant qu’il y a des transitions insensibles entre l’humble salam de l’Hindou, la profonde révérence qui, en Europe, est le signe d’un grand respect et l’inclinaison moins forte de la tête qui exprime la considération, nous sommes obligés de reconnaître que le signe de tête familier, et quelquefois à peine perceptible, est la dernière trace de la prosternation primitive.

Ces différentes abréviations que nous voyons dans l’hommage