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avaient actuellement besoin pour les temples, les fêtes ou les chefs. » À propos des tributs dans tout le pays de Montézuma, consistant en « provisions, vêtements et une grande variété d’articles, » on nous dit : « Quelques-uns étaient payés annuellement, d’autres tous les six mois et d’autres tous les huit jours. » Ensuite, à propos des présents offerts par quelques personnes à l’époque des fêtes en signe de leur soumission, Toribio dit : « Ainsi il semble manifeste que les chefs, les marchands et les propriétaires n’étaient pas obligés de payer, mais payaient volontairement des taxes. »

Les commencements de l’histoire de l’Europe nous montrent quelques traces de cette transformation des présents volontaires en tribut obligatoire. Parmi les sources de revenus des rois mérovingiens, Waitz énumère les dons offerts volontairement par le peuple en différentes occasions (particulièrement à l’occasion des mariages), outre ceux qu’il offrait tous les ans primitivement aux assemblées de mars, mais plus tard à d’autres périodes vers le commencement de l’année ; ces dons, d’abord volontaires, devinrent progressivement des taxes fixes. Ensuite, parlant de ces mêmes présents annuels du peuple sous la dynastie carlovingienne, le même auteur dit que depuis longtemps ils n’étaient plus offerts librement et qu’Hincmar même les désigne sous le nom de taxes. Ils comprenaient des chevaux, de l’or, de l’argent, des bijoux, des réquisitions pour les palais du roi ; les cloîtres donnaient des vêtements, et Waitz ajoute que ces redevances ou tributa avaient toutes un caractère plus ou moins privé : quoique obligatoires, elles n’étaient pas encore devenues des impôts dans le sens littéral du mot. Certains documents prouvent que les présents volontaires offerts par les villes aux potentats qui y entraient devinrent également obligatoires. Il fallut les ordres exprès du roi pour que Paris offrît des présents au duc d’Anjou en 1584 et, en d’autres occasions, aux ambassadeurs et aux monarques étrangers.

La transformation eut lieu à mesure que la valeur des monnaies devenait plus fixe et les payements en argent plus faciles ; exemple dans la période carlovingienne : « ce qu’on appelle l’inferenda est une redevance payée d’abord en bétail, maintenant en argent ; » exemple tiré de notre propre histoire : « les villes offrant au roi et à sa suite qui les traversaient de l’argent au lieu des dons en nature. » Le passage suivant extrait de Stubbs terminera convenablement la liste de nos témoignages :

« Les revenus ordinaires du roi d’Angleterre comprenaient uniquement les produits tirés des propriétés royales et de ce qui avait été le folkland, outre le feormfultum ou provisions en nature con-